Page d'histoire : Création de La Vie parisienne d'Offenbach 31 octobre 1866

Les dieux perchés en leur Olympe ont dû sourire devant leurs turpitudes incarnées sur terre par des mortels tirés de l’imagination du plus français des compositeurs, né à Cologne, naturalisé en 1860.

Après les succès d’Orphée aux Enfers (1858) et de La Belle Hélène (1864), Jacques Offenbach va renouveler ce genre de spectacle dont il est le créateur en France, « l’opéra bouffe ».

Et puisque l’époque est à l’Empire façon Napoléon III, pourquoi ne pas la mettre en scène ? Fini la mythologie, vive la fête impériale ! Et quelle fête ! Champagne au théâtre du Palais-Royal ! Tout cela dans le plus pur style d’une société qui brille de ses derniers feux et bientôt basculera dans la guerre de 1870. Et qui mieux pour représenter la liberté des moeurs que Paris ? Dans le contexte de l’Exposition universelle de 1867 et de l’essor des transports ferroviaires, jamais oeuvre n’a aussi bien « collé » à son époque, oscillant entre cynisme et optimisme, marivaudage et insouciance.

Car derrière l’apparente légèreté des compo sitions d’Offenbach perce une satire au vitriol des moeurs. Les contemporains ne s’y sont pas trompés, puisqu’« on l’accusa de blasphémer l’Antiquité et de mettre en vedette les problèmes sociaux » (Gustav Kobbé).

Tous les publics, des majestés au petit peuple, ovationnent La Vie parisienne créée en 1866 au théâtre du Palais-Royal. Toutes les classes sociales confondues, des domestiques (Alphonse) à la demi-mondaine (Metella), du parvenu enrichi (le Brésilien) aux aristocrates (les Gondremarck) et aux artisans (bottier et gan tière), tout un chacun veut jouir de cette vie parisienne et « s’en fourrer jusque-là ». Offenbach, virtuose du violoncelle et doté d’une excellente culture musicale, connaît toutes les fi celles, en use et abuse, s’amuse en parodiant le « grand » opéra et ses « roucoulades », jugé plus sérieux que ses « oeuvrettes » dédaignées par ses pairs.

Qui n’a pas fredonné l’un des nombreux « tubes » de La Vie parisienne : le rondeau du Brésilien ou « Je suis veuve d’un colonel »… ? L’oeuvre sera d’ailleurs déclinée en de nombreuses versions, et même reprise par des musiciens et chorégraphes du XXe siècle : Manuel Rosenthal et Léonide Massine en 1938, pour les Ballets russes de Monte-Carlo, puis Maurice Béjart en 1978, au théâtre de la Monnaie, pour le ballet Gaîté parisienne.

 

Marie-Véronique Vaillant
documentaliste aux Archives nationales

Source: Commemorations Collection 2016

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