Inventaire d'archives : Groupement des contrôles radioélectriques
Contenu :
, par Nicole Even, après une première étude du
fonds par Jean-Daniel Pariset Introduction
Dans la sous-série 65AJ sont conservées les archives du Groupement des contrôles
radioélectriques (GCR), créé en 1940 par le gouvernement de Vichy. Le GCR était un service
interministériel formé par le regroupement des services d'écoutes des ministères, qui jusqu'en
1939 avaient chacun son organisation propre : Guerre, Air, Marine, PTT (Radiodiffusion),
Intérieur (Police de la TSF). Le regroupement s'est tout d'abord opéré progressivement, sans
qu'aucun texte vienne officialiser cet état de fait.
Une loi du 29 mai 1943 créa le Service central de réception des émissions radioélectriques,
placé sous le contrôle direct du chef du Gouvernement, ministre de l'Information.
Le Groupement des contrôles radioélectriques (GCR) fut mis à la disposition du Service
central de réception des émissions radioélectriques (SCRER) par le Secrétariat d'Etat aux
Communications jusqu'à la date de cessation des hostilités. Pendant la Seconde Guerre mondiale,
la direction politique du Service central de réception des émissions radioélectriques était
placée sous l'autorité du Secrétaire général à l'Information. La direction technique et la
gestion administrative étaient assurées par la Radiodiffusion nationale.
Le Groupement des contrôles radioélectriques fut dissous le 1er mai 1944 et le Service
central de réception des émissions radioélectriques cessa son activité le 12 octobre 1944.
Immédiatement reconstitué à la Libération, le GCR fut rattaché en 1945 au ministère des
Armées.
En 1946, pour souligner son caractère interministériel, le GCR fut rattaché à la Présidence
du Conseil, ministère de l'Information.
Le 18 février 1948, un Comité interministériel restreint prit une décision de principe
proposant la suppression du Groupement des contrôles radioélectriques en tant qu'organisme
indépendant et son éclatement en deux branches : l'une, la partie "écoutes", rattachée au
Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE), l'autre, la partie
"gonio", rattachée à la Direction de la Surveillance du Territoire de la Direction générale
de la Sûreté nationale (ministère de l'Intérieur).
A la suite de cette délibération, le secrétaire d'Etat à la Présidence du Conseil en charge
du GCR fut chargé de consulter les départements ministériels intéressés pour examiner la façon
dont pouvait être appliquée cette réorganisation. Finalement, le GCR fut mis pour emploi à la
disposition du SDECE, service rattaché alors à la Présidence du Conseil, puis, en 1971, au
ministère de la Défense.
NB : le SDECE assumait la plupart des tâches accomplies jusqu'en 1940
par les 2es bureaux des trois armes, mais ne se limitait pas aux seules questions militaires.
Son activité, qui s'exerçait en dehors du territoire métropolitain, avait un triple but : le
renseignement, le contre-espionnage, l'action politique.
Le GCR avait pour mission de détecter, d'identifier et de localiser les postes émetteurs de
radio, d'assurer l'écoute des émissions radio et de diffuser ses interceptions aux services
destinataires. Les principaux utilisateurs du GCR étaient le ministère de la Défense nationale,
le SDECE, le ministère de l'Intérieur et le ministère des Affaires étrangères.
Les tâches du GCR étaient de deux ordres :
- la radiogoniométrie qui consiste à localiser un émetteur de radio. Le GCR disposait de
réseaux fixes implantés en France métropolitaine, en Afrique du Nord, dans les zones
d'occupation (Allemagne, Autriche), dans l'Union française et notamment en Indochine.
- les écoutes, qui comprennent : d'une part les écoutes spéciales qui consistent en
l'interception des émissions faites par des postes en principe inconnus, dont l'existence n'est
pas déclarée. Elles portent notamment sur les émissions faites par des postes militaires,
clandestins ou par ceux des ambassades. Les renseignements recueillis sont en général exploités
par le SDECE qui donne les directives nécessaires ; d'autre part, les écoutes confidentielles,
qui consistent en l'interception des émissions faites par des postes en principe connus, dont
l'existence a un caractère officiel. Elles portent notamment sur le trafic radiotéléphonique et
radiotélégraphique et sur des émissions importantes des stations étrangères de radiodiffusion.
Les renseignements recueillis sont diffusés directement par le GCR et utilisés notamment par les
Affaires étrangères ou transmis au SDECE lorsqu'ils sont chiffrés.
NB : des émissions de stations étrangères se trouvent également sous les
cotes F/41/130-F/41/155.
Le fonds se subdivise en grandes parties, dont plusieurs séries chronologiques de bulletins
qui sont formés par la transcription sur papier des écoutes de radios étrangères.
Tout d'abord ont été classées les archives du GCR de Paris. Le fonds s'ouvre sur une série
de Bulletins d'écoutes générales (postes connus), classées par ordre chronologique de 1942 à
1971.
Pour la période de la guerre, de 1942 à 1944, les écoutes sont faites par le gouvernement
de Vichy ; elles concernent aussi bien les radios anglaises ou suisses qu'allemandes ou
autrichiennes. Elles constituent une source originale et intéressante pour les historiens de
la Seconde Guerre mondiale. Les émissions portent sur des sujets très variés : déroulement
militaire de la guerre, politique, propagande, mais aussi souffrances et vie quotidienne des
populations. Pour la période suivante, les émissions portent essentiellement sur les grandes
questions de politique internationale et sur la vie politique intérieure de chaque pays.
Ensuite ont été classés des dossiers de documentation constitués par le centre lui-même sur
des sujets donnés, pour la période 1940-1945. Comprenant aussi des feuilles de transcription des
émissions de radios étrangères, ces dossiers concernent la vie politique française, par exemple
le transfert des pleins pouvoirs à Laval en 1942 ou l'assassinat de l'amiral Darlan, ou la
situation de la France dans certaines régions, les événements militaires, la situation de
l'Empire français.
Une autre série concerne les pays étrangers, classés par ordre alphabétique. La série se
clôt par quelques dossiers concernant la vie politique internationale ainsi que les persécutions
nazies.
Les Bulletins d'écoutes générales sont pourvus de tables, de 1943 à 1971, classées sous les
cotes 65 AJ 1180-1231.
Une deuxième série de bulletins, Bulletins d'informations techniques, couvre la période
1959-1971. Les bulletins donnent la transcription d'émissions de radio concernant
essentiellement les expériences spatiales et aéronautiques américaines et soviétiques. Les
Bulletins sont également pourvus de tables des matières, pour toute la période.
Le GCR, à partir des écoutes, réalisait des études sur des sujets précis, portant sur la
France et son Empire, les pays étrangers et les questions internationales. Quelques-unes - la
série est probablement très incomplète - ont été conservées et sont classées sous les cotes
65AJ/1264-65AJ/1265.
Le GCR avait également un centre d'écoutes à Alger, qui captait les radios d'Algérie et du
monde arabe en général, dont des radios clandestines. Ces transcriptions d'émissions sont
conservées à partir du 21 mai 1958. Ces documents sont extrêmement intéressants pour l'histoire
des événements d'Algérie et l'état d'esprit des populations à ce moment-là.
Le GCR d'Alger réalisait comme celui de Paris, des études sur des sujets spécifiques,
spécialement sur les radios du monde arabe et la manière dont le FLN s'est servi de la radio
pour répandre ses idées, thème susceptible d'intéresser les historiens de la propagande.
Enfin, ont été classées une série d'études sur des radios du monde entier, étude à la fois
technique et politique, utile pour des recherches sur l'histoire de la radio.
Cote :
65AJ/1-65AJ/1282
Publication :
Archives nationales
1987, 2006
Localisation physique :
Pierrefitte-sur-Seine
Identifiant de l'inventaire d'archives :
FRAN_IR_000893