Inventaire d'archives : Fonds Bertrand (1794-1884)
Contenu :
L’époque napoléonienne a toujours constitué un terrain d’élection pour les chercheurs, souvent à l’affût de documents inédits permettant d’éclairer cette épopée d’une nouvelle lumière. La mise à disposition des archives Bertrand constitue donc aujourd’hui un véritable événement puisqu’elles permettent, d’une part, de dresser le portrait du plus fidèle des généraux de Napoléon Ier et d’autre part d’approcher encore d’avantage la figure impériale dont la postérité ne se lasse pas de vouloir pénétrer les secrets. Fruit d’un mois de travail et répondant à l’effort de classement des fonds des maréchaux d’Empire entrepris par la Section des Archives privées depuis quelques années, cet instrument de recherche vient s’ajouter à dix-sept autres répertoires concernant la même période.
De la provenance de ce fonds, des anciens propriétaires ou des conditions dans lesquelles les documents le composant passèrent le siècle qui succéda à la mort du général Bertrand, nous ne savons rien. Son histoire remonte, au sein des Archives nationales, à l’année 1962, le 8 mars exactement, où celles-ci achetèrent, lors d’une vente aux enchères à l’hôtel Drouot, leurs premiers papiers du général datant de la campagne d’Égypte, qui entrèrent dans le cadre de classement des Archives nationales, sous la cote 390 AP, au sein de la série chargée de recueillir les fonds de personnes et de familles. Dès lors, commença une très longue période d’accroissement du fonds marquée par 17 achats successifs, en ventes publiques ou auprès de libraires spécialisés, dans un intervalle de 38 années. Après 40 années d’investissements et d’acquisitions nouvelles, le fonds s’était suffisamment étoffé pour faire l’objet d’un classement cohérent. C’est pourquoi, il fut mis au rang des priorités de l’année 2000.
Sommaire
390AP/1. Papiers personnels.
390AP/2-390AP/30. Papiers de fonction.
- 390AP/2. Expédition d’Égypte. 1798-1801.
- 390AP/3. Camp de Saint-Omer. 1804.
- 390AP/4. Voyage en Italie. 1805.
- 390AP/5. France, inspection du Génie. 1808.
- 390AP/6. Campagne d’Allemagne et d’Autriche. 1809.
- 390AP/7. Frontières du traité de Vienne, inspection du Génie. 1809.
- 390AP/8-390AP/14. Hollande, inspection du Génie. 1810.
- 390AP/15-390AP/19. Provinces illyriennes. 1810-1813.
- 390AP/20. Campagne de Russie. 1812.
- 390AP/21. Campagne de France. 1814.
- 390AP/22. Ile d’Elbe. 1814-1815.
- 390AP/23. Cent-Jours. 1815.
- 390AP/24-390AP/29. Sainte-Hélène. Dictées sur l’Égypte. 1815-1821.
- 390AP/30. Retour en France. 1821-1844.
390AP/31-390AP/32. Documents relatifs à Bertrand. 1798-1884.
390AP/33. Documents sans relation. 1801-1809.
390AP/34-390AP/35. Suppléments. 1819-1856.
- Correspondance personnelle, donations faites par l’empereur, exécution du testament de l’empereur, succession du général Bertrand. 1821-1856.
- Dictées sur l’Égypte. 1819.
Structure du fonds.
Issu de nombreux achats, ce fonds, composé de 58 lots constitués selon une logique de vente se révéle, par conséquent, fort hétérogène. En effet, des documents ayant appartenu à Bertrand y côtoient des documents fort postérieurs (transcriptions). En outre, certains dossiers, pour répartir la valeur des lots, ont été éclatés au détriment de la structure originelle du fonds. De ce fait, il a fallu créer un plan de classement tentant de reconstituer ce qu’avait pu être le fonds et qui devait répondre à deux exigences essentielles : d’une part, faire ressortir les papiers qui constituaient le cœur du fonds Bertrand, soit, ses papiers personnels (390AP/1 et 34-35) et ses papiers de fonction (390AP/2-30), d’autre part, distinguer les documents qui n’auraient pas dû se trouver dans un tel fonds (390 AP 31-33). Du fait de sa grande hétérogénéité, le traitement de ce fonds a rendu nécessaire une analyse pièce à pièce de son contenu.
A l’issue de ce travail, il apparaît que ce fonds possède un contenu très composite face auquel le lecteur doit être vigilant. En effet, ne se composant finalement que d’une assez faible quantité de documents, il peut paraître surprenant qu’il renferme autant de cotes (33 cotes en totalité). Ceci s’explique par le fait que les documents, très variés et souvent isolés qui composent ce fonds ne pouvaient être regroupés sans risquer de perdre la lisibilité et la cohérence du classement.
Dès lors, le chercheur doit s’attendre à trouver des dossiers très inégaux selon les périodes concernées. Ainsi en est-il des papiers personnels de Bertrand (390AP/1, 34-35) qui ne représentent qu’une toute petite partie du fonds, composée d’un manuscrit autographe et de correspondance familiale, tandis que les papiers de fonction du général constituent la majorité du fonds (390AP/2-30).
De plus, toutes les périodes de la vie de Bertrand ne sont pas représentées dans ce fonds. Il n’y a, par exemple, dans ces documents, aucune trace de son enfance ou de sa formation militaire à l’École du génie et il semble, à la vue des papiers de fonction, que la carrière de Bertrand ne commence qu’à partir de l’expédition d’Égypte, qui elle, est particulièrement bien représentée.
Cette campagne est en effet abordée de divers points de vue dans ce fonds. D’une part, les lettres reçues en Égypte par Bertrand de son père (390AP/1, d. 3), donnent une image indirecte du jeune général ; d’autre part, les documents du génie illustrent, par des rapports et de très belles cartes aquarellées, les positions défensives de l’armée sur les côtes égyptiennes et le coût des travaux mis en œuvre à ces fins, tandis que les journaux tenus par Bertrand relatent en détail le siège d’Aboukir (390AP/2) ; enfin, minutieusement écrites par Bertrand sous la dictée de Napoléon à Sainte-Hélène, sont des documents de premier ordre puisqu’ils constituent également un témoignage de l’Empereur. Les campagnes d’Égypte et de Syrie,
Du retour d’Égypte à son départ pour la Hollande en 1810, les documents sont très divers et assez dispersés (390AP/3-7). Par contre, concernant la Hollande, le fonds est particulièrement important, alors que Bertrand n’y passe que dix mois en tout dans sa vie. Une grande partie de ses documents de travail semble ici réunie : rapports et cartes manuscrites ou imprimées donnent une image assez complète du pays en tant qu’espace privilégié de défense contre l’Angleterre (390AP/8-14).
Aucun document ne nous donne de détail sur la participation de Bertrand à la bataille d’Essling ou à la victoire de Wagram, où il semble pourtant que son travail fut essentiel, tandis que la période où il fut gouverneur des provinces illyriennes (1810-1813) est particulièrement bien représentée, notamment grâce aux nombreux rapports et minutes adressés à l’Empereur par Bertrand, qui y relate, dans le détail, les problèmes qu’il rencontre et les réflexions que lui inspirent la géographie, l’organisation et la population de ces provinces (390AP/15-19).
Très peu de documents évoquent la campagne de Russie, uniquement quelques calques (390AP/20), ainsi que la campagne de France (390AP/21), l’île d’Elbe (390AP/22) et les Cent-Jours (390AP/23) : il s’agit essentiellement, à part quelques lettres signées de Napoléon, de documents de gestion administrative ou domestique de la maison de l’Empereur.
Le séjour à l’île de Sainte-Hélène (390AP/24-29) est certainement une des périodes les plus riches de ce fonds. Elle est en effet représentée notamment par les manuscrits des écrits sur place par Bertrand et publiés bien après sa mort. Cahiers de Sainte-Hélène
Quant au retour en France du général (390AP/30), les documents présents dans le fonds ne concernent pratiquement que la succession de Napoléon et laissent donc sous silence la reprise de la vie publique du général comme député de l’Indre ou encore ses nombreux voyages aux Antilles.
Intérêt du fonds.
Le destin exceptionnel du général Bertrand et surtout sa fidélité inébranlable vis-à-vis de l’Empereur ainsi que sa position d’homme de confiance rendent ses archives particulièrement intéressantes et vivantes. Les nombreux manuscrits autographes qui composent ce fonds, qu’ils prennent la forme de réflexions sur la guerre, de récits sur la vie de l’Empereur à Sainte-Hélène ou d’émouvants mémoires, attestent tous de la richesse du témoignage d’un des compagnons privilégiés de Napoléon. Bertrand s’apparente, par sa position de biographe, à certains de ses contemporains (1), dont le plus connu est certainement Las Cases, auteur du . Les manuscrits de et les qui firent l’objet de publications à titre posthume, sont des récits très détaillés mais très difficiles à déchiffrer. Mémorial de Sainte-Hélènela Campagne d’Égypte et de SyrieCahiers de Sainte-Hélène
Par ailleurs, le reste du fonds, composé essentiellement de ses documents de fonction en tant que général dans le génie, sont d’une grande diversité en matière de rapports et riches en cartes concernant les travaux de fortifications pour protéger les frontières nouvelles de l’Empire (notamment en Hollande) et les constructions défensives, en période de campagne (notamment la campagne d’Égypte). Enfin, la correspondance abondante de Bertrand avec les grands de son époque, généraux d’Empire ou membres de la famille impériale, complète et éclaire souvent les documents arides du génie, tout en donnant au lecteur la satisfaction de toucher aussi à la « petite histoire ».
Ainsi, malgré son métrage modeste, le fonds du général Bertrand fournira de précieux renseignements à qui s’intéresse à l’épopée napoléonienne et contribuera à faire connaître davantage ce personnage atypique et attachant, ce « fidèle d’entre les fidèles », qui dort encore aujourd’hui aux côtés de son maître sous le dôme des Invalides.
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1. Citons également Marchand, Montholon ou Gourgaud : voir Bibliographie.
Cote :
390AP/1-390AP/35
Publication :
Archives nationales (France)
2023
Pierrefitte-sur-Seine
Informations sur le producteur :
Bertrand, Henri-Gatien (1773-1844)
Fils d’Henri Bertrand, conseiller au bailliage de Châteauroux, maître particulier des Eaux et Forêts et subdélégué de l’intendance en cette ville, et de Marie-Henriette Bouchet, fille de Martin Bouchet, premier ingénieur du Roi, inspecteur général des Ponts et Chaussées de France, Henri-Gratien Bertrand naît à Châteauroux le 28 mars 1773.
Admis au collège royal et militaire de La Flèche, il y fait ses études de 1782 à 1790. En avril 1790, il se rend à Paris, s’enrôle dès 1792 dans un bataillon de la Garde nationale, « les filles de Saint-Thomas », et prend part, lors de la journée du 10 août, à la défense des Tuileries et à la protection de Louis XVI. Au cours de l’année 1793, il suit, à la pension académique du faubourg Saint-Honoré, la préparation du concours d’entrée à l’École du génie et, le 16 juillet, se présente au concours où il est reçu premier. Le lendemain, il est fait sous-lieutenant de l’École du génie de Mézières. Celle-ci est transférée à Metz pendant le mois de février 1794 et, en septembre, Bertrand participe, dans l’armée de Sambre et Meuse, au siège de Maëstricht. Il est ensuite promu lieutenant et bientôt capitaine, le 21 mars 1795.
Dès lors, il est nommé « instructeur des fortifications » à l’École polytechnique de Paris où il remplace provisoirement le célèbre Monge, professeur de stéréotomie (1) et de géométrie descriptive.
L’année 1796 marque le début de ses voyages. Il accompagne en Turquie l’ambassadeur de France, le général Aubert-Dubayet, pour y étudier des travaux projetés dans les Dardanelles. Pendant le voyage, il fait de nombreuses étapes à Gêne, Venise, Ancône, aux Bouches de Cattaro (2), à l’île de Zante, Patras et Athènes. Mais, à Constantinople, la mission Aubert-Dubayet n’ayant pas abouti, il quitte les rivages du Bosphore, en avril 1797, et revient par voie de terre, passant par Andrinople, Sofia et Raguse (3). Rattaché alors à l’armée d’Italie et mis à la disposition de la République, il est chargé des travaux de fortification de différentes places, notamment à Osoppo sur le haut Tagliamento ; puis, en octobre, il se rend à Passeriano au moment où Bonaparte négocie le traité de Campoformio.
Le 9 avril 1798, il reçoit les félicitations du directoire de la République cisalpine pour l’organisation du génie. Le 19 mai, la flotte française commandée par le vice-amiral Brueys part pour l’expédition d’Égypte. Le 10 juin, c’est la prise de Malte ; le 2 juillet 1798, Bertrand débarque en Égypte au sein de la division du général Bon. La bataille d’Alexandrie a lieu ce même jour, la prise de Damanhour le 9, et la bataille des Pyramides le 21. Le 24 juillet, les troupes françaises entrent au Caire. Pendant son séjour dans cette ville, Bertrand s’occupe non seulement des travaux de fortification de la citadelle, mais également de l’approvisionnement en eau, des canaux et de constructions diverses. Le 1er août, l’amiral Nelson détruit la flotte française en rade d’Aboukir ; le 7 août, Bertrand est nommé chef de bataillon.
En septembre 1801, suite à la capitulation d’Alexandrie, le 31 août, Bertrand rentre en France avec l’armée d’Égypte. Promu au grade d’ inspecteur des fortifications, le 21 août 1802, il inspecte les fortifications de France en 1803 et devient, le 3 septembre de la même année, commandant du génie du camp de Saint-Omer, destiné à former l’armée de débarquement en Angleterre. Distingué de l’ordre de la Légion d’honneur, il est décoré des mains mêmes de Napoléon des grades de chevalier et de commandeur. Il assiste au sacre de Napoléon le 2 décembre 1804.
Aide de camp de l’Empereur le 7 mars 1805, il l’accompagne, d’avril à juillet, en Italie, où Napoléon Ier se fait couronner roi d’Italie à Milan. De retour au camp de Boulogne, il se voit confier, le 25 août 1805, une mission d’inspection et de reconnaissance « du Rhin et du Danube, [où il] remontera fleuves et cours d’eau jusqu’à leur source, observera le confluent de Passau, [et fera] une étude très détaillée sur Ulm et jusqu’à Rastadt » (4). Mais en novembre, il se trouve à Schönbrünn, le jour de la capitulation de Vienne, et il participe, le 2 décembre, à la victoire d’Austerlitz, en assurant à l’armée française la possession des ports du Danube. Après la signature du traité de Presbourg, le 26 décembre 1805, il est envoyé de nouveau en Allemagne pour une mission de reconnaissance jusqu’en septembre 1806 (Worms, Düsseldorf, Wesel, Cassel). Le 14 octobre 1806, Bertrand participe à la bataille d’Iéna. En décembre, pendant la campagne de Prusse et de Pologne (1806-1807), il part en Silésie où il dirige les travaux de la tête de pont de Praga (5) et vérifie tous les ponts sur la Vistule.
Le 8 février 1807, c’est la bataille d’Eylau ; le 13, Bertrand est envoyé en mission auprès du roi de Prusse, Frédéric-Guillaume III, auquel il fait des ouvertures de paix, sans lendemain. Il rejoint Lefebvre au siège de Dantzig, du 1er avril au 21 mai 1807 ; le 30 mai, juste après l’entrée des Français dans cette ville, il est nommé général de division par l’Empereur lui-même. Il se distingue ensuite à la bataille de Friedland, le 14 juin 1807, et accompagne Napoléon à l’entrevue de Tilsit où il construit le fameux radeau sur le Niémen, siège de la rencontre de l’Empereur et du tsar Alexandre Ier. Il rentre à Paris fin juillet 1807.
Le 10 février 1808, il reçoit l’ordre d’inspecter tous les ports de l’ Atlantique et de la Manche. Le 19 mars, il est nommé comte de l’Empire. Cette même année, il accompagne Napoléon en Espagne et se marie, le 16 septembre, avec Françoise-Elisabeth Dillon, dite Fanny, fille d’Arthur Dillon, héros de Valmy.
En mars 1809, l’Autriche ayant déclaré la guerre à la France, il est nommé commandant en chef de l’armée du génie d’Allemagne et dirige les travaux de construction de ponts sur le Danube, qui concourent à la victoire de Wagram, le 6 juillet 1809. Le même été naît son premier enfant, appelé Napoléon, dont l’impératrice Joséphine sera la marraine. Après ses exploits, il est nommé, le 14 août, grand aigle de la Légion d’honneur. Le 14 octobre, la paix étant signée, Bertrand, accompagné de sa femme, est chargé d’effectuer la difficile reconnaissance des nouvelles frontières que le traité de Vienne accorde désormais à l’Empire français, aux confins de la Croatie. Il accompagne ensuite le voyage impérial à Bruxelles, et est envoyé en Hollande, pour faire la reconnaissance de ce royaume récemment incorporé à la France, de mars à novembre 1810. Là, il étudie la défense du pays, le rôle de chacune des places fortes et des nombreuses lignes d’inondation qui constituent le principal atout défensif du pays.
Le 18 novembre 1810, naît sa fille Hortense, dont le parrain sera le prince Eugène de Beauharnais. Le 9 avril 1811, Bertrand est nommé gouverneur général des Provinces illyriennes, en remplacement de Marmont, duc de Raguse. Le 15 avril, un décret de Napoléon, relatif à la nouvelle organisation de l’Illyrie, y annonce la création de sept provinces : Carinthie, Carniole, Istrie, Croatie civile, Croatie militaire, Dalmatie et territoire de Raguse. Le 29 juin 1811, la famille Bertrand arrive à Laybach (6), capitale administrative et résidence d’été du gouverneur. Bertrand y a pour adjoints le comte de Chabrol , intendant général, et le baron de Coffinhal-Dunoyer, commissaire de justice. En juillet 1811, Bertrand inspecte les fortifications à Trieste et, de septembre à novembre, il visite la Dalmatie (Spalato, Castelnuovo, Raguse, Cattaro ). Il revient à Trieste le 2 décembre où son fils Henri naît trois jours plus tard.
Pendant cette période en Illyrie, Bertrand maintient la tranquillité des provinces en prévenant les mouvements excités chez les Monténégrins par les intrigues de la Russie, chez les Albanais par les Turcs et, sur le littoral, par les Anglais. Son attention se porte à la fois sur les troupes de terre, sur la marine et sur toutes les ressources naturelles et industrielles du pays comme le commerce du coton, les salines ou les mines de mercure. Il signe donc de nombreux arrêtés concernant les réformes (administration, douanes, justice, enseignement, travaux publics et mesures concernant le blocus continental), se montre assez libéral et bénéficie de la sympathie de la population de toutes les provinces. Par contre, l’administration militaire est plus sévère (conscription, surveillance du littoral), car la flotte anglaise ne cesse de louvoyer dans l’Adriatique et assiège les îles. Le 9 janvier 1813, il est nommé commandant en chef du corps d’observation d’Italie où il doit constituer une armée. En février, il est toujours à Trieste, où son successeur, Junot, duc d’Abrantès, est alors nommé.
Le 13 mars 1813, Bertrand quitte l’Illyrie et se rend à Vérone ; en avril, il est présent à Augsbourg, Mayence et Cobourg ; en mai, à la bataille de Lützen et à celle de Bautzen. Puis, les hostilités reprenant en août, il commande le IVème corps d’armée lors de la bataille de Leipzig, du 16 au 19 octobre 1813. Le 18 novembre, il est nommé grand-maréchal du palais à la place de Duroc, décédé le 22 mai 1813, durant la campagne d’Allemagne. Mais, en décembre 1813, la France est envahie par les armées alliées. Bertrand quitte Paris avec Napoléon le 25 janvier 1814 et participe aux victoires de Champaubert, Montmirail, Château-Thierry, avant la capitulation de Paris fin mars. Après le traité de Fontainebleau du 11 avril 1814 et l’abdication de l’Empereur, il décide d’accompagner celui-ci à l’île d’Elbe. Il part avec Napoléon pour Fréjus d’où ils embarquent sur la frégate anglaise pour débarquer le 4 mai 1814 à Portoferraio. The Undaunted
Là, l’Empereur constitue une petite cour et un gouvernement : Bertrand est ministre de l’Intérieur, le général Drouot gouverneur et ministre de la Guerre, le trésorier Peyrusse ministre des Finances, et Cambronne commande l’armée dès son arrivée avec la Garde. Bertrand est rejoint par sa famille sur l’île, mais, dès février 1815, il est chargé d’organiser la fuite de l’île d’Elbe. Le départ de Portoferraio a lieu le 26 février 1815. Après le débarquement à Golfe Juan, les fameuses proclamations aux soldats et au peuple sont signées par Bertrand. Celui-ci accompagne l’Empereur dans sa marche fulgurante jusqu’à Grenoble et Lyon où Napoléon publie les premiers décrets des Cent-Jours signés par Bertrand. Pendant toute cette période, Bertrand ne quitte pas Napoléon jusqu’à la défaite de Waterloo, le 18 juin 1815. Le gouvernement de Fouché se met en place trois jours plus tard et, le 22 juin, Napoléon abdique en faveur du roi de Rome.
Dès lors, il doit s’exiler en Amérique où Bertrand, toujours aussi fidèle, décide de l’accompagner avec Savary, Gourgaud, Las Cases, Montholon et le général Becker, accompagnateur délégué par le gouvernement provisoire. De l’île d’Aix, l’embarquement se fait à bord du le 15 juillet 1815. Le 31 juillet, Napoléon est informé de sa déportation à Sainte-Hélène. Les passagers arrivent le 15 octobre 1815 devant l’île. Bertrand débarque le 17 octobre et visite Jamestown. Napoléon réside provisoirement aux Briars. Le 10 décembre, tandis que Napoléon s’installe à Longwood, Bertrand va habiter à Hutsgate. Bellerophon
Le 15 avril 1816, le nouveau gouverneur de l’île, sir Hudson Lowe, est reçu par Napoléon. Les exilés doivent signer une déclaration par laquelle ils certifient être restés de plein gré à Sainte-Hélène et s’engagent à ne pas quitter l’île sans sa permission. Les relations entre Napoléon et le gouverneur se détériorent très vite et, à partir d’août 1816, un véritable duel épistolaire et verbal entre le geôlier et son prisonnier se fait jour par l’intermédiaire de Bertrand ou de Montholon. Le 20 octobre, la famille Bertrand vient habiter à Longwood une nouvelle maison, à 150 mètres de la résidence de Napoléon ; le 17 janvier 1817, naît Arthur Bertrand, tandis que l’Empereur présente les premiers symptômes de sa maladie.
C’est sur l’île, que l’Empereur dicte ses et au général Bertrand. Parallèlement, Bertrand écrit ses , une relation scrupuleuse, au jour le jour des moindres mots, faits et gestes de son Empereur du 1er avril 1816 à mai 1821. Lettres du CapLes campagnes d’Égypte et de SyrieCahiers de Sainte-Hélène
Le 30 décembre 1816, Las Cases a quitté l’île ; le 14 mars 1818, Gourgaud part à son tour ; Bertrand perd ainsi son meilleur compagnon. Il apprend, en outre, qu’il a été condamné à mort par contumace en 1816, par le deuxième conseil de la guerre de la 1ère division militaire, en application de l’ordonnance de Louis XVIII du 24 juillet 1815 pour avoir « porté les armes contre sa patrie et son légitime souverain ».
La rupture définitive entre Bertrand et Hudson Lowe est marquée par la dernière lettre de Bertrand au gouverneur datée du 24 juillet 1818. En août 1819, Napoléon rédige son testament qu’il confie à Bertrand et qui sera annulé par la suite. Le 19 septembre 1819, arrivent le docteur Antommarchi ainsi que les abbés Bonavita et Vignali, envoyés par le cardinal Fesch, à la demande de Bertrand.
Au cours de l’année 1820, Bertrand apprend la mort de son père (le 4 octobre) ; l’Empereur est au plus mal. Du 13 au 16 avril 1821, Napoléon rédige de nouveau son testament et du 16 au 29 avril, les huit codicilles. Bertrand, Montholon et Marchand sont les exécuteurs testamentaires. Le 5 mai , le général Bertrand assiste aux derniers moments de Napoléon.
Ses obsèques ont lieu le 9. Bertrand se réconcilie avec Hudson Lowe, selon les dernières volontés de Napoléon, et tous les exilés quittent Sainte-Hélène le 27 mai. Arrivé en Angleterre le 2 août, Bertrand apprend le 24 octobre qu’il est amnistié par ordonnance royale de Louis-Philippe, ce qui lui permet de . Il arrive à Châteauroux le 22 mars 1822, où son retour fait l’objet de manifestations de sympathie de la part de la population. Il séjourne tantôt à Paris, tantôt dans l’Indre, au château de Laleuf, propriété familiale. Le 6 juillet 1823, naît son dernier fils, Alphonse. revenir en France
En 1825, Bertrand est admis à la retraite mais, en 1830, la Révolution de juillet marque son retour à la vie publique : le 21 novembre, il est nommé à la tête de la 4e légion de la garde nationale ; le 26 novembre, Louis-Philippe le nomme commandant de l’École polytechnique et le 5 juillet 1831, il est élu député de l’Indre, fonction dans laquelle il fait valoir ses idées libérales : établissement des libertés publiques, économie des deniers de l’Etat, liberté de la presse. Après de nombreuses publications et quatre années de vie politique, il n’est pas réélu le 21 juin 1834 et renonce finalement à celle-ci.
Le 6 mars 1836, Mme Bertrand décède ; le 16 octobre, Bertrand part pour la Martinique, dans l’intention de s’occuper des propriétés de sa femme. Il quitte Cherbourg fin décembre avec son fils Arthur et arrive à la Martinique en février 1837, où il séjourne dans la propriété des Salines, s’occupant de ses moulins à sucre et de la plantation de coton.
De retour un an et demi plus tard, il remet, le 6 juin 1840, solennellement à Louis-Philippe, les armes de Napoléon ; le 12 juin, le nécessaire de vermeil de Napoléon est donné à la Ville de Paris. Enfin, selon la volonté de Louis-Philippe de rapatrier les « restes mortels de feu l’Empereur Napoléon de Sainte-Hélène en France », l’expédition de part le 7 juillet 1840, dirigée par le prince de Joinville. Outre Bertrand et son fils Arthur, y participent quelques compagnons d’exil tels que Gourgaud, le fils de Las Cases et Marchand. L’expédition rentre le 30 novembre 1840 à Cherbourg et la cérémonie solennelle a lieu le 15 décembre aux Invalides. C’est Bertrand qui est chargé par Louis-Philippe de placer l’épée d’Austerlitz sur le cercueil de l’Empereur. retour des cendres
En 1842, Bertrand retourne à la Martinique. Toujours épris de libéralisme, il accomplit une tournée d’information aux Antilles concernant l’émancipation des noirs et la suppression de l’esclavage qui le préoccupent particulièrement. Elle le conduit à la Dominique, la Guadeloupe, Sainte-Croix, Porto Rico, la Jamaïque et la Havane.
Après un bref séjour aux Etats-Unis en 1843, il rentre en France et meurt quelques mois plus tard à Châteauroux, le 31 janvier 1844. Ses obsèques ont lieu le 1er février 1844. Un an plus tard, une loi est votée qui décide que les restes mortels des deux grands maréchaux du Palais (Duroc, duc de Frioul et le général, comte Bertrand) seront transférés aux Invalides. La cérémonie a lieu le 5 mai 1847.
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1. Science traditionnelle de la coupe des matériaux employés dans la construction (taille des pierres, art du trait en charpenterie).
2. Cattaro : aujourd’hui, Kotor.
3. Raguse : aujourd’hui, Dubrovnik.
4. Cité dans, . Ed. revue et augm. Paris, Fayard, 1999, p. 216. Dictionnaire Napoléon
5. Aujourd’hui, quartier de Varsovie.
6. Laybach : aujourd’hui, Ljubljana, capitale de la République démocratique de Slovénie.
Informations sur l'acquisition :
Achats : 8 mars 1962 [n° 1749] ; 25 octobre 1962 [n° 1796] ; 28 février 1963 [n° 1817] ; 21 octobre 1975 [n° 2593] ; 5 décembre 1978 [n° 2802] ; 13 décembre 1982 [n° 3090] ; 8 juin 1983 [n° 3128] ; 23 mai 1986 [n° 3496] ; 9 décembre 1991 [n° 4015] ; 30 décembre 1991 [n° 4022] ; 14 mai 1992 [n° 4048] ; 19 mai 1992 [n° 4051] ; 16 décembre 1992 [n° 4104] ; 13 juin 1994 [n° 4234] ; 29 octobre 1999 [n° 4540] ; 3 décembre 1999 [n° 4547] ; 28 juin 2000 [n° 4592] ; 5 avril 2002 [n° 4767] ; 14 janvier 2003 [n° 4825] ; 20 juillet 2004 [n° 4976] ; 2 juin 2005 [n° 5035] ; 3 avril 2006 [n° 5119] ; 2011 [n° 2011/36] ; 31 mai 2016 [n° 20160341] ; 9 février 2017 [n° 20170067].
Description :
Mise en forme :
Abréviations utilisées dans le répertoire :
autographe. autogr.
annoté(s), annotée(s). annot.
dossier d.
édité, édition. éd.
imprimé(e). impr.
lettre autographe. l.a.
lettre autographe signée. l.a.s.
lettre signée. l.s.
lettre sans nom d’auteur. l.s.n.a.
manuscrit(s), manuscrite(s). ms.
numéro. n°
page. p.
pièce. pce.
signée(s). s.
sans date. s.d.
tome. t.
traduction. trad.
volume. vol.
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Conditions d'utilisation :
Reproduction autorisée, selon les modalités en vigueur aux Archives nationales.
Description physique :
Importance matérielle :
15 cartons (390AP/1-390AP/35) ; 1,5 mètre linéaire.
Ressources complémentaires :
Références bibliographiques :
Cette bibliographie n’a pas pour but d’être exhaustive. Elle recense tous les ouvrages consultés au cours du classement et de l’analyse des documents du fonds Bertrand.
I. SOURCES IMPRIMÉES
, Paris, Au comptoir des imprimeurs-unis, 1847, 2 vol. Campagnes d’Égypte et de Syrie 1798-1799 : mémoires pour servir à l’histoire de Napoléon dictées par lui-même à Sainte-Hélène, et publiées par le général Bertrand avec un atlas de 18 cartes
, Paris, Imprimerie impériale, MDCCCLVIII - MDCCCLXIX. Tomes I à XXXII. Correspondance de Napoléon Ier publiée par ordre de l’Empereur Napoléon III
Bertrand (général), , décryptés et annotés par Paul Fleuriot de Langle : Cahiers de Sainte-Hélène
- Journal 1816-1817, Paris, éd. Sulliver, 1951.
- Journal 1818-1819, Paris, éd. Albin Michel, 1959
- Journal janvier-mai 1821, Paris, éd. Sulliver, 1949.
Les Cahiers de Sainte-Hélène se composent de trois volumes publiés après la mort de Bertrand et correspondent à la cote 390 AP 25. Le premier volume commence le 14 avril 1816 et ne comprend pas le Journal de Sainte-Hélène coté 390 AP 24, qui commence le 1er avril 1816. Celui-ci reste donc à ce jour, inédit. En revanche, les « dates et notes pouvant servir de suite au journal du comte Las Cases », également cotées 390 AP 24, ont été intégrées à ce premier volume par l’éditeur. D’autre part, il faut souligner que ces « Cahiers » ne restituent pas le texte original de façon intégrale. Les document publiés comptent en effet de nombreuses lacunes certainement dues aux difficultés de lecture du manuscrit.
Bertrand (général Henri Gatien), , texte établi, présenté et commenté par Thierry Houdecek, Paris, Perrin, 2021. Cahiers de Sainte-Hélène : les 500 derniers jours (1820-1821)
Bertrand (général), , déchiffrées et annotées par S. de la Vaissière-Orfila, Paris, éd. Albin Michel, 1979. Lettres à Fanny 1808-1815
Gourgaud (baron G.), , éd. augm. d’après le texte original, Paris, Flammarion, 1947, 2 vol. Journal de Sainte-Hélène, 1815-1818
Las Cases (comte E. de), , Genève, La Palatine, 1949. Mémorial de Sainte-Hélène : le voyage de Napoléon de Malmaison à Longwood, juin-décembre 1815
Marchand (L.), , Paris, Plon, 1952-1955, 2 vol. Mémoires de Marchand, valet de chambre et exécuteur testamentaire de l’Empereur
, Paris, Tallandier, 2011.Mémoires de Napoléon. Tome II. La campagne d’Égypte 1798-1799, édition présentée par Thierry Lentz
Montholon (comte C. de), , Paris, Didot, 1823-1825, 6 vol. Mémoires pour servir l’histoire de France sous Napoléon, écrits à Sainte-Hélène par les généraux qui ont partagé sa captivité
II. DICTIONNAIRES
Mourre (M.), , nouvelle édition, Paris, Bordas, 1996, 5 vol. Dictionnaire encyclopédique d’histoire
Robinet (dr.), Robert (A.) et Le Chaplain, , Paris, Librairie historique de la Révolution et de l’Empire, s.d., 2 vol. Dictionnaire historique et biographique de la Révolution et de l’Empire, 1789-1815
Six (G.), , Paris, Georges Saffroy Editeur, 1934, 2 vol. Dictionnaire biographique des généraux et amiraux français de la Révolution et de l’Empire (1792-1814)
Tulard (sous la dir. de J.). , 2 édition, Paris, Fayard, 1999, 2 vol. Dictionnaire Napoléone
III. OUVRAGES GENERAUX SUR LA PÉRIODE
, présenté par S. d’Huart et J. Babelon, 1970. Le testament de Napoléon
Benoist-Méchin (J. ), , Lausanne, Guilde du livre, [cop. 1966]. Bonaparte en Égypte
Bernardy (F. de), , Paris, Perrin, 1973. Eugène de Beauharnais 1781-1824
Gotteri (N. ), . Paris : Nouvelles éditions latines, 1990. Grands dignitaires, ministres et grands officiers du Premier Empire : autographes et notices biographiques
Houssaye (H.), , Paris, Perrin, 1899, 3 vol. 1814-1815 : La première Restauration ; le retour de l’île d’Elbe ; les Cent-Jours ; Waterloo ; la seconde abdication
Hubert (E. ), , Paris, éd. René Julliard, 1966. Les Cent Jours
Pivec-Stele (M.), , Paris, Bossard, 1930. La vie économique des provinces illyriennes (1809-1813) suivi d’une bibliographie critique
Madelin (L.), , Paris, éd. Librairie Jules Tallandier, 1937, 16 vol. Histoire du Consulat et de l’Empire
Martineau (G.), , Paris, éd. Librairie Jules Tallandier, 1981. Napoléon à Sainte-Hélène
Martineau (G.), , Paris, éd. Librairie Jules Tallandier, 1990. Le retour des cendres
Quennerat (J.C.), , Paris, Bruxelles, éd. Séquois, 1966. Atlas de la Grande Armée : Napoléon et ses campagnes (1803-1815)
Vial (Charles-Eloi), , Paris, Bibliothèque nationale de France, 2018.Napoléon à Sainte-Hélène : l’encre de l’exil
IV. OUVRAGES RELATIFS AU GÉNÉRAL BERTRAND
, catalogue de l’exposition du 150e anniversaire de la mort du général Bertrand (1773-1884), réalisée à l’hôtel Bertrand de Châteauroux du 14 mai au 4 septembre 1994, Châteauroux, Impr. Laboureur, 1994. Le général Bertrand, fidèle compagnon de Napoléon, 1773-1844
, catalogue de l’exposition du bicentenaire de la naissance du général Bertrand (1773-1844) du 6 juillet au 31 octobre 1973, Châteauroux, Impr. Laboureur et Cie, 1973. Le général Bertrand, fils du Berry
Berthelot (M.), , Châteauroux, 1996. Bertrand, grand maréchal du Palais : dans les pas d’un fidèle
Budé (E. de), « Souvenirs du général Bertrand », dans , 1910. Le correspondant
Chérot (H.), « Le général Bertrand en 1813-1814 », dans t. 91, 1902, n° 90-92. Les Etudes,
Lubin (G.), « Un compagnon de Sainte-Hélène, le grand général Bertrand », dans , 1955. Miroir de l’Histoire
Lucas-Dubreton (J.J.), « Le greffier de Sainte-Hélène : le général Bertrand », dans , n°231, 1958. Plaisir de France
Saliquet (abbé), « La famille du général Bertrand », dans juin-sept. 1912. Revue du Berry,
Surrault (Annette), , préface de Thierry Lentz, [Issoudun], A. Lyner, 2012.De la campagne d’Égypte au Berry : le général Henri-Gatien Bertrand et le savant Hervé Faye, 1798-1844
Vasson (J. de), , Issoudun, Impr. Laboureur et Cie, 1945. Bertrand, le grand maréchal de Sainte-Hélène
Localisation physique :
Pierrefitte-sur-Seine
Identifiant de l'inventaire d'archives :
FRAN_IR_004922