Universitaire spécialiste de l’aire culturelle Europe-Maghreb-Méditerranée, et en particulier du Maghreb colonial, René Gallissot a consacré de nombreux travaux à la sociologie historique de la question nationale, à l’histoire du mouvement ouvrier international (histoire des mouvements nationaux, du syndicalisme, du socialisme et du communisme) et à histoire des relations inter-ethniques, des migrations et du racisme. Son engagement n’a pas été seulement scientifique et théorique. Militant anticolonialiste dans les années 1950 et 1960, marxiste « existentialiste » et critique, il a eu l’occasion de se présenter comme « [appartenant] à la « génération intellectuelle et politique algérienne, pour dire marquée à la fois par l’irruption d‘une guerre de libération nationale toute proche mettant en cause directement l’idéologie nationaliste en France et par le refus communiste français et soviétique de donner la priorité militante aux luttes de libération » et toujours revendiqué un « internationalisme de transformation des rapports sociaux dans le monde » (extrait d’un entretien publié en ligne sur le site de la revue Période, consultable en ligne). .

René Gallissot est né en février 1934. Élève de l’École normale supérieure de Saint-Cloud de 1955 à 1960, intéressé par la question du nationalisme et de l’autonomie nationale, il fréquente le séminaire qu’animent Georges Haupt et Claudie Weill à la Maison des sciences de l’Homme de Paris. En 1957/1958, désireux d’approcher au plus près la lutte de libération algérienne, il se met en congé et part séjourner au Maroc, à Casablanca, pour rédiger un mémoire de DES (Diplôme d'études supérieures) intitulé La question du travail et l'attitude du patronat européen au Maroc de 1931 et 1939.

Agrégé d’histoire en 1960, il entame sa carrière d’enseignant au lycée d’Auxerre (année scolaire 1960/1961) avant d’être, en fin de sursis, sous obligation de service militaire en Algérie. Il est alors envoyé à l’École militaire préparatoire de Koléa (à 35 kilomètres d’Alger), puis à l’Université d’Alger. De 1962 à 1967, il enseigne l’histoire contemporaine à la faculté des Lettres (de 1962 à 1964, il y est assistant d’histoire contemporaine, puis délégué dans les fonctions de maitre-assistant (1964-1966) puis maitre-assistant titulaire durant l’année universitaire 1966/1967), à l’Institut d’études politiques et à l’École nationale d’administration d’Alger, et anime un séminaire sur le thème « socialisme et nationalisme ».

En 1963, il soutient une thèse d’histoire de Troisième cycle, menée sous la direction de Jacques Droz, sur le sujet des Internationales et de la question nationale et coloniale (voir les paries reprises sous le titre « Nazion e nazionalita nei debattiti del movimento operaio », in Storia del Marxismo. Volume 2 : Marxismo nell'età delia Seconda Internazionale, Turin, Einaudi, 1979, pp. 786-865). De retour en France en 1967, il est nommé maître-assistant d’histoire contemporaine à la Sorbonne et collabore à la direction des recherches au Centre d’histoire du syndicalisme dirigé par Jacques Droz.

A la rentrée universitaire 1969, il est nommé maître-assistant d’histoire contemporaine à la toute nouvelle Université de Vincennes (devenue université Paris 8 Saint-Denis), au sein de laquelle il exercera le reste de sa carrière comme maître de conférences à partir de 1985, puis professeur dès 1992.

René Gallissot a soutenu en 1988 une thèse de doctorat d’Etat (sous la direction de René Girault) intitulé La question nationale et coloniale. Le nationalisme historique. Directeur de recherche, il a dirigé plus d’une trentaine de thèses et de nombreux mémoires universitaires de différents niveaux. Membre du laboratoire de lexicologie politique (ILF, Institut de linguistique française et CNRS) de 1974 et 1981, il a également été membre associé (1976-1984) puis directeur (1984-1990) du laboratoire CNRS Chryséis (Méditerranée-Cultures-Migrations/relations). Il a contribué à la création de l’Institut Maghreb-Europe de l’université Paris 8, dont il a été, à partir de 1991, le co-directeur.

Auteur de nombreux articles et ouvrages, directeur de publication des volumes Algérie et Maroc du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier (le « Maitron »), René Gallissot a fondé dans les années 1970 et présidé l’association Pluriel, consacrée aux recherches en sciences sociales sur les relations interethniques, les problèmes de minorités et la question nationale. De 1975 et 1984, cette association a publié 36 numéros d’une revue, Pluriel ou Pluriel-débat, (collection consultable à La contemporaine conservée sous la cote 4 P 8430), puis, à partir de 1992, divers numéros de Pluriel-Recherche : vocabulaire historique et critique des relations interethniques, et une publication monographique homonyme conservée à La contemporaine sous la cote O pièce 56390.

Longtemps membre du comité de rédaction de la revue Le Mouvement social, il a aussi dirigé, de 1989 à 1998, L’Homme et la société, revue internationale de synthèse en sciences sociales.

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