Page d'histoire : Guglielmo Marconi réalise la première communication sans fil au-dessus de l'Atlantique 12 décembre 1901

Guglielmo Marconi, avant 1937

Guglielmo Marconi est une figure représentative de l'inventeur-entrepreneur de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, de cette période charnière où les inventeurs, des bricoleurs souvent autodidactes, à la tête de petits ateliers, laissent la place aux entreprises collectives rassemblant ingénieurs, scientifiques et techniciens dans des laboratoires de recherche.

Les premières transmissions par ondes de messages morse sont expérimentées de façon simultanée et indépendante - schéma classique en histoire des techniques - en deux lieux bien différents : en Russie, par Alexandre S. Popov, professeur de physique à l'École des torpilleurs de Cronstadt, en Italie par Guglielmo Marconi, dans la villa bolognaise de ses parents. Tous deux utilisent des dispositifs assez proches - des émetteurs issus de ceux de Hertz, des récepteurs munis d'un tube à limaille de type Branly et reliés à des fils servant d'antenne. Le destin de ces deux inventeurs, fortement déterminé par leurs conditions de travail et leur lieu de vie, sera bien différent.

Fils d'un entrepreneur italien aisé et d'une mère irlandaise, originaire d'une riche famille, les Jameson, négociant en whisky, le jeune Marconi a su tirer le meilleur parti d'une situation bien favorable : des moyens financiers familiaux importants pour lancer sa propre entreprise, des lettres d'introduction lui permettant, à son arrivée à Londres en 1896, de nouer rapidement des relations décisives avec un excellent expert en brevet, avec le puissant ingénieur en chef du Post Office, avec les milieux d'ingénieurs et d'électriciens britanniques en conflit ouvert avec les physiciens maxwelliens, ses principaux concurrents, avec la Royal Navy et une grande compagnie maritime, la Lloyd, sans oublier la disposition d'un yacht personnel, pièce maîtresse d'un " marketing " efficace (premières retransmissions " en direct " de courses au large). Tous ces facteurs vont concourir, directement ou indirectement, à son succès : en déterminant son terrain d'expérimentation, les océans, très favorable aux essais, en soutenant son entreprise par des commandes, par des démonstrations publiques spectaculaires, par des aides techniques…

Il est pourtant une " qualité " dont seul Marconi semble doté : une détermination quasi obsessionnelle, une " foi " en sa capacité à établir des liaisons sur des distances toujours plus longues, malgré les obstacles naturels (la rotondité de la Terre), malgré des élaborations mathématiques décourageantes : la portée de ses transmissions passe de 2 à 54 kilomètres entre 1897 et 1898, traverse la Manche en 1899, d'autres mers par la suite.

S'associant en 1899 les services d'un excellent expert en ingénierie de puissance électrique, J. A. Fleming, Marconi lance dans le plus grand secret et malgré l'opposition initiale des directeurs de la Marconi's Wireless Telegraph Compagny, son projet de liaison transatlantique, un défi : sauter sans essai intermédiaire d'une liaison de 200 km, déjà testée, à une transmission sur plusieurs milliers de kilomètres. Marconi entre dans la légende des plus grands inventeurs en assurant avoir détecté les 12 et 13 décembre 1901, à Newfoundland (Canada), les trois lettres " S " émises depuis sa station de Poldhu (Angleterre). Associée au nom de Marconi, la télégraphie sans fil s'impose alors au monde entier.

Michel Atten
directeur des collections historiques de France Télécom

 

Source: Commemorations Collection 2001

Liens