Page d'histoire : Raoul Follereau Nevers, 17 août 1903 - Paris, 6 décembre 1977

Un lépreux agitant sa crécelle, fin du XVe siècle, BnF, département des Manuscrits, Français 9140, fol.15v.

Raoul Follereau est né en 1903 à Nevers. Son père, qui avait fondé une petite entreprise de construction métallique, est tué en 1917. Il publie en 1920 son premier livre, Le Livre d’amour. Il y trace un programme de vie : « Pourquoi ne ferais-je pas de ma vie, de tous les jours de ma vie, une seule œuvre d’amour ? ». Il gagne Paris et engage des études de philosophie et de droit. Le service militaire effectué, i lépouse à Nevers, le 22 juin 1925, Madeleine Boudou.

Il pourrait devenir avocat mais il préfère travailler comme secrétaire de rédaction à L’Intransigeant... Chrétien fervent et patriote ardent, attiré par l’Italie et sa culture, il fonde la Ligue d’Union latine qui rassemble des poètes animés du même idéal. Il donne des pièces de théâtre et des recueils de poésie remarqués, et édite de jeunes auteurs. Il parcourt l’Amérique du sud durant les années trente et se lie d’amitié avec les pilotes de l’Aéropostale. En 1936, à l’occasion d’un reportage en Afrique du nord, il découvre l’œuvre du Père Charles de Foucauld qui devient son héros et son modèle.

Recherché par les Allemands durant la guerre car ses articles sur « Hitler, visage de l’Antéchrist » ne sont pas passés inaperçus, il se cache à Vénissieux, chez les sœurs de Notre Dame des Apôtres. Celles-ci veulent créer, à Adzopé en Côte d’Ivoire, en 1942, un village destiné aux lépreux et à leurs familles car ces malades, exclus de leurs communautés, souffrent de l’abandon et du plus cruel dénuement. L’argent manque. Raoul Follereau choisit alors de mettre son talent de conférencier au service de ce projet. Il prononce, au cours des années suivantes, plusieurs milliers de conférences dans toute la France et au-delà.Le village de lépreux d’Adzopé voit le jour et devient un centre de référence. Mais ailleurs dans le monde, des millions de lépreux vivent des situations de détresse. Or, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les médecins montrent que la lèpre est une maladie moins contagieuse qu’on ne l’a longtemps cru et, surtout, que des médicaments, les sulfones, permettent désormais de guérir les malades. Raoul Follereau renonce à sa carrière littéraire et décide de se consacrer à la cause des lépreux. Ami personnel des papes, le « vagabond de la charité » est aussi un apôtre du traitement scientifique de la maladie et de la lutte contre les traditions et les préjugés sociaux qui excluent le lépreux de la société. Toujours accompagné de son épouse Madeleine, il parcourt le monde à la rencontre des lépreux, il soutient financièrement ceux qui oeuvrent à leur service, il sensibilise l’opinion internationale à leur sort. Il fonde en 1954 la Journée mondiale des lépreux qui est aujourd’hui célébrée chaque année à la fin du mois de janvier dans la plupart des pays du monde. Il fait abolir les lois d’exception qui frappent ces malades. Aidé d’amis efficaces, il fonde, dans plusieurs pays européens pour commencer, de puissantes associations qui relaient ses interventions, engagent un travail d’envergure, poursuivent et développent encore son oeuvre après sa mort.

Raoul Follereau a aussi oeuvré en faveur de beaucoup d’autres catégories de déshérités.Dans son esprit, l’engagement en faveur des lépreux n’est qu’un épisode d’un combat beaucoup plus vaste pour une civilisation de l’amour : « La seule vérité,c’est de s’aimer », répète-t-il inlassablement dans ses Messages à la jeunesse du monde et dans son Petit livre d’amour maintes fois réédité et traduit en plusieurs dizaines de langues.

Étienne Thévenin
maître de conférences en histoire contemporaine
université de Nancy 2

Source: Commemorations Collection 2003

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