Page d'histoire : André-Ernest Modeste Grétry Liège (Belgique), 8 février 1741 - Montmorency (Val-d'Oise), 24 septembre 1813

André Ernest Modeste Grétry, compositeur (1741-1813)
Huile sur toile d'Élisabeth Louise
Vigée Le Brun, 1785
Versailles, châteaux de Versailles et de Trianon
© RMN-Grand Palais (Château de
Versailles) / Daniel Arnaudet
 

Grétry fait partie de ces hommes qui trouvent tôt le juste domaine de leur talent. Il est formé à la maîtrise de la Cathédrale Saint-Denis à Liège avec la complicité de son père musicien. Il étudie le chant et le violon et s’essaie timide- ment à la composition. Sa vocation de compositeur d’opéra    naît    lors    d’une représentation de l’opéra- buffa de Pergolèse : La Serva Padrona. Il est séduit par les charmantes ariettes et découvre également l’art dramatique et son importance dans le champ musical. Envoyé à Rome, il travaille avec Casali, maître de chapelle de Saint-Jean de Latran. Il se plie sans conviction aux exigences d’écriture de la musique religieuse.

Sa passion pour les idées des encyclopédistes s’exprime tôt. Il rencontre Voltaire à Genève qui lui conseille de tenter sa chance à Paris, tout en jugeant durement les œuvres lyriques françaises du temps. Son premier opéra parisien, Les Mariages Samnites (1768), n’aura aucun succès.

Il base alors son travail sur l’étude de la prosodie française et sur la manière de combiner son style musical italianisant avec le goût français, le tout sous la forme d’un spectacle où alternent airs chantés et parlés. Alliant sa nouvelle approche au talent du librettiste Marmontel, Le Huron d’après Voltaire  est un triomphe immédiat. L'Europe entière l'acclame. Il devient familier à la cour de Louis XV puis de Louis XVI.

La vogue du Huron a atteint toutes les classes de la population. Les opéras comiques de Grétry sont repris dans toute la France, mais aussi à Bruxelles, en Allemagne, en Suède, en Russie, soit chantés en français, soit traduits. Grétry règne sur toutes les scènes musicales. Une telle popularité n’est pas banale, et c’est sans doute grâce à elle que le musicien doit d’échapper aux violences des années de terreur de la Révolution. En effet, outre quelques œuvres de circonstance qui témoignent, ses thèmes musicaux les plus réussis sont accaparés par des franges politiques bien différentes.

Il reçoit les honneurs les plus divers, même sous la Révolution. Il est désigné Inspecteur des études au Conservatoire de Paris et connaît encore la gloire sous le Directoire et le Consulat. Il est admis à l’Institut et siège aux côtés du peintre Jacques-Louis David. En 1802, il est fait chevalier de la Légion d’honneur par Bonaparte.

André-Modeste Grétry composera surtout des opéras-comiques et publiera divers livres dont Mémoires ou essais sur la musique et Réflexions d’un solitaire.

Il nous apparaît comme un homme sensible, qui croit en l’excellence de la nature humaine, mais la disparition de ses filles s’accordait difficilement à sa nature profonde qui cherchait à voir l’existence sous son jour le plus favorable. Dès lors, sa créativité musicale s’amenuise au profit de son talent littéraire qui couvre les domaines les plus variés, avec la même tonalité philosophique qu’un Rousseau.

En homme de théâtre, il sait mettre sa vie en scène. Il pose aussi des actes symboliques forts : racheter l’Ermitage de Rousseau n’est pas le moindre. De même, il fait don de son cœur à sa ville natale pour être d’esprit à Liège et de corps à Paris. Il marque de cette façon les liens du cœur et de l’esprit qui réunissent le peuple.

“ Où peut-on être mieux qu’au sein de sa famille ? ”

Patrick Dheur
pianiste concertiste, compositeur
responsable du Musée Grétry de Liège (Belgique)

Source: Commemorations Collection 2013

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