Page d'histoire : Joseph Marie Vien Montpellier (Hérault), 18 juin 1716 - Paris, 27 mars 1809

Suzanne et les vieillards,
huile sur toile de Joseph Marie Vien, vers 1743-1744,
Nantes, musée des Beaux-Arts.
© RMN / photo G. Blot

Peu d’artistes comme Joseph Marie Vien obtinrent si haute réputation. De son vivant déjà, on parlait de lui comme du restaurateur de l’école française. On lui composa des hymnes. Sous Napoléon, il fut nommé comte d’Empire et Jacques-Louis David, le plus fameux de ses élèves, tint à le représenter dans son célèbre tableau du sacre de l’Empereur.

Vien ne fait pas partie des peintres majeurs, retenus par l’histoire de l’art comme auteurs d’oeuvres capitales. Son importance a été plutôt d’avoir ouvert de nouvelles voies à l’art pictural. Par son oeuvre et surtout grâce à son grand talent pédagogique, il conduisit l’évolution de la peinture française de l’époque rococo vers le néoclassicisme. En raison de son intégrité personnelle, il obtint tous les postes académiques : membre de l’Académie royale de peinture et de sculpture, directeur de l’Académie de France à Rome ainsi que directeur de l’Académie royale de peinture et de sculpture et Premier peintre du roi. Grâce à sa réputation et soutenu par David, il surmonta les troubles de la Révolution.

Né à Montpellier, Vien fit cependant son apprentissage à Paris chez Charles Joseph Natoire et obtint le prix de Rome en 1744. Son séjour à Rome fut décisif pour ses orientations esthétiques. Dans l’étude de la sculpture antique, des peintres de la Renaissance italienne et de l’école de peinture de Bologne, il chercha le retour à la « grande manière ». Le cycle sur la vie de sainte Marthe à Tarascon est un exemple éminent de cette conception qui supplanta la peinture rococo dominée par François Boucher. Au Salon de 1753, son tableau L’Ermite endormi (musée du Louvre) fi t grande sensation à cause de l’exactitude de l’étude d’après nature. Vien n’atteint pourtant le sommet de sa carrière que quelques années plus tard avec des sujets antiquisants pour lesquels il reçut vraisemblablement quelques directives du comte de Caylus. La Marchande d’amours (château de Fontainebleau) symbolisa pour beaucoup de critiques du Salon de 1763, parmi lesquels Diderot, la redécouverte de la peinture antique. Le retour à un art qui se distinguait par la « simplicité », la « grâce » et des « couleurs pures » et l’étude des modèles antiques apparurent aux contemporains comme un tournant dans le mouvement pictural. En 1772, Mme du Barry suivit l’engouement général pour le style classique en renvoyant à Fragonard les peintures pour son pavillon de Louveciennes, qu’il avait déjà livrées sur commande, pour les remplacer par des tableaux modernes de Vien. Le directeur des Bâtiments du roi, d’Angiviller, commanda à Vien une série de scènes de grand format d’après Homère qui furent exposées au Salon. Dans ses dernières années, il revint au genre « anacréontique » qu’il avait développé et produisit des dessins en abondantes séries.

À la mort de Vien à l’âge avancé de quatre-vingt-treize ans, nombre de ses élèves comme Jean-François Peyron, Joseph Benoît Suvée, Jean-Baptiste Regnault, François Guillaume Ménageot, François André Vincent et surtout Jacques Louis David avaient repris son enseignement et conduit le néoclassicisme à un nouveau sommet de la peinture française.

Thomas W. Gaehtgens
directeur du Getty Research Institute

Source: Commemorations Collection 2016

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