Page d'histoire : Publication de l'ordonnance de 1816 sur l'instruction primaire 29 février 1816

Le Maître d’école,
lithographie d’après N. T. Charlet, Gihaut frères, 1828,
Rouen, musée national de l’Éducation.
© Réseau Canopé / Musée national de l’Éducation, Rouen

En 1815, l’enseignement primaire est le parent pauvre du système scolaire. Des projets de la Révolution ne subsiste qu’un corpus de références et de principes dont s’inspireront les militants républicains des générations suivantes. Plus prosaïque, François Guizot n’y verra, dans ses mémoires que « des chimères qui planaient sur des ruines ». L’Université impériale (1806) réorganise en principe tous les degrés de l’enseignement. Les petites écoles n’en sont pas moins laissées aux bons soins des communes et des particuliers. Le retour de la paix crée un climat plus favorable à l’instruction élémentaire. L’idée, libérale et conservatrice, que l’école du peuple est un facteur de prospérité publique tout en contribuant au « bon ordre de la société », prévaut dans l’entourage de Louis XVIII et en particulier au sein de la Commission d’instruction publique.

L’ordonnance du 29 février 1816 porte la marque de cet élan nouveau. Assez réaliste pour ne pas imposer de but en blanc la création d’une école par commune, elle prescrit néanmoins que « toute commune sera tenue de pourvoir à ce que les enfants qui l’habitent reçoivent l’instruction primaire, et à ce que les indigents la reçoivent gratuitement ». Pragmatique, le texte autorise les communes à se grouper pour entretenir une école et leur permet de gérer le salaire des maîtres en percevant la rétribution des parents et en fixant la liste des élèves gratuits. Dans chaque canton un comité comprenant le curé cantonal, le juge de paix et, si possible, le principal du collège, est chargé d’oeuvrer à l’essor de la scolarisation, tout en veillant au respect de l’ordre, des moeurs et de l’enseignement religieux ; au village, le maire et le curé sont institués « surveillants spéciaux » de l’école.

Pour la première fois, un brevet de capacité, à trois degrés, est exigé des maîtres. Le troisième degré est attribué à ceux qui savent seulement lire, écrire et chiffrer ; le second à ceux qui savent en outre l’orthographe, le calcul et la méthode de l’enseignement simultané. Le troisième, plus savant, ne trouve alors guère preneur. Si, la première année, la plupart des brevets sont du troisième degré, en quinze ans, la majorité des maîtres ont acquis un brevet du deuxième degré, preuve de la hausse du niveau des compétences. En 1819-1820, l’État étend aux filles les principales dispositions de l’ordonnance de 1816. Limitée dans son objet, mais assez méthodiquement appliquée, l’ordonnance de 1816 aura contribué à élargir l’offre d’école, ouvrant la voie à la grande loi Guizot de 1833. Raison suffisante sans doute pour que le ministre de Louis-Philippe n’y consacre pas le moindre commentaire dans ses mémoires !

Yves Gaulupeau
directeur du musée national de l’Éducation (Rouen)

Source: Commemorations Collection 2016

Liens