Page d'histoire : Prise du pouvoir par Louis XIII

Portrait du roi Louis XIII, huile sur toile de Frans II Pourbus, vers 1620, Chambéry, musée des Beaux-Arts.

En ce début de 1617, l’impopularité de Concini, marquis d’Ancre, maréchal de France et favori de la reine mère Marie de Médicis, est à la mesure de sa toute-puissance supposée. Louis XIII est alors un garçon de quinze ans, mélancolique et complexé, qui souffre d’être tenu à l’écart des affaires. Concini ne lui montre aucune déférence et se couvre la tête en sa présence. Le roi craint même d’être dépossédé de son trône en faveur de son frère cadet le duc d’Anjou, préféré de Marie et plus malléable, à seulement huit ans. Louis XIII ne trouve de consolation qu’auprès de son confident Luynes. Est-ce ce gentilhomme provençal qui le persuade de se défaire de l’indésirable Italien, comme avait fait Henri III, en 1588, du trop puissant duc de Guise ? Une simple arrestation, suivie d’un procès, pouvant tourner à la confusion du roi, il faut que celui-ci assume un acte d’autorité sous la forme éventuelle d’un attentat. Quand Vitry, capitaine des gardes du corps, chargé d’arrêter le maréchal, s’enquiert de l’attitude à adopter dans le cas – prévisible – d’un refus d’obtempérer de l’intéressé, Louis XIII, qui garde le silence, donne son consentement tacite à une exécution, par l’entremise de Luynes, qui, posté derrière lui, finit par lâcher : « Le roi entend qu’on le tue. » Le 24 avril 1617, à l’entrée du Louvre, Concini est abattu de plusieurs coups de pistolet par Vitry et ses hommes. Apprenant la nouvelle, Louis XIII s’écrie : « À cette heure, je suis roi ! » Juché par ses partisans sur une table de billard, d’où il aperçoit une créature du défunt, l’évêque de Luçon, Richelieu, il lui décoche : « Eh bien, Luçon, me voilà libéré de votre tyrannie ! Allez, allez, ôtez-vous de là ! » Le tandem gouvernemental à venir commence bien mal ! Il est vrai qu’il s’agira alors d’un mariage de raison d’État. Tandis que la populace parisienne s’acharne sur le cadavre du maréchal d’Ancre, déterré puis démembré, Marie de Médicis, enfermée dans ses appartements, se voit signifier son exil à Blois. Les anciens ministres d’Henri IV sont rappelés, leurs suppléants renvoyés, dont Richelieu, qui prend la route de Luçon. Quant à Leonora Galigaï, veuve de Concini et soeur de lait de la reine mère, accusée de sorcellerie, elle est jugée et condamnée à mourir par le feu. « Il est bien temps que je fasse ma charge », aurait déclaré Louis XIII après l’exécution de Concini. Exécution, et non assassinat, car expression de la justice retenue du roi. Parce qu’il a pris la forme apparente d’un vulgaire meurtre, l’histoire n’a guère fait honneur au « coup de majesté » de 1617. Il préfigurait pourtant ceux que le même roi réitérera en 1630, avec la journée des Dupes, cette fois en faveur de Richelieu, puis que Louis XIV accomplira en 1661 en décidant de se passer de Premier ministre.

Laurent Avezou
professeur CPGE lycée Pierre-de-Fermat, Toulouse

Source: Commemorations Collection 2017

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