Page d'histoire : Georges de Scudéry Marseille (Bouches-du-Rhône), 22 août 1601 – Paris, 14 mai 1667

Registres de la nation germanique de l’université d’Orléans : Matricula.
Index des procurateurs, 1637-1781, Orléans, archives départementales du Loiret.

Ce « Matamore des Lettres », tel qu’il fut longtemps considéré, a commencé dans la carrière des armes avant de se tourner vers la poésie, le théâtre et enfin le roman. Protégé de Richelieu, il a profité du renouveau théâtral dès 1631 et a écrit une quinzaine de pièces jusqu’en 1644 : pour l’essentiel des tragi-comédies, genre en vogue (Le Prince déguisé, L’Amour tyrannique, Andromire), mais également deux tragédies (La Mort de César, Didon) et trois comédies (La Comédie des comédiens). S’y retrouvent le goût de l’époque pour les rebondissements, déguisements, quiproquos, amours contrariées, le théâtre dans le théâtre, l’esthétique de la surprise, et dans les pièces sérieuses les situations pathétiques héritées de l’Antiquité. Scudéry s’inscrit alors comme un de ces jeunes dramaturges enthousiastes et plus ou moins respectueux des règles en train de s’élaborer. Il a été l’un des premiers à réagir contre le succès du Cid en 1637 en se donnant une posture de docte imbu d’Aristote et est resté un adversaire virulent de Corneille tout au long de la fameuse querelle, bien que l’Académie française n’ait pas approuvé in fine toutes ses Observations sur le Cid. Quant à son Apologie du théâtre de 1639, c’est une réponse à un pasteur qui condamnait la scène sans restriction. Élu à l’Académie française en 1650, il a composé aussi des poésies mondaines, galantes ou encomiastiques (sonnets, épigrammes, stances, odes, etc.) ainsi qu’un Cabinet de Monsieur de Scudéry (1646), où il décrit en vers une centaine de tableaux. Il fut gouverneur du fort de Notre-Dame de la Garde à Marseille de 1644 à 1647. Cependant, proche de la Fronde des princes, il dut s’éloigner jusqu’en Normandie de 1654 à 1660 ; c’est là qu’il épouse Marie-Madeleine du Moncel de Martinvast. Après sa carrière théâtrale et jusqu’à sa mort, son prénom est associé à celui de sa soeur, Madeleine, à l’occasion de la publication de nombreux romans qualifiés de « précieux » (Ibrahim, ou l’Illustre Bassa, dès 1641). Aujourd’hui, c’est bien à sa soeur qu’on en attribue plutôt la composition. Scudéry aborda aussi le genre de l’épopée avec Alaric, ou Rome vaincue (1654), moqué par Boileau. Bien qu’il reste pour nous à l’ombre de Corneille, Scudéry, loin d’être un ridicule « mâche-laurier » avide seulement de reconnaissance officielle, est représentatif d’une génération dynamique d’auteurs prolifiques, aux carrières plus ou moins heureuses, qui ont renouvelé le théâtre et la poésie du premier XVIIe siècle.

Jean-Marc Civardi
maître de conférences à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines

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Source: Commemorations Collection 2017

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