Document d'archives : OEUVRE DES LIBEREES DE SAINT-LAZARE

Contenu :

Le fonds de l'Oeuvre des Libérées de Saint-Lazare, très lacunaire, se présente pour l'essentiel sous la forme de volumes reliés et pour la plupart imprimés. Seuls deux volumes d'un grand intérêt contiennent des archives manuscrites. Ce sont, d'une part, des "notes sur les asiles" (cote 137J3) consignées entre 1888 et 1892 par Isabelle Bogelot, directrice générale de l'oeuvre de 1887 à 1905, et des "lettres des protégées" (cote 137J5) reçues par cette dernière entre 1894 et 1896. Pour le reste, l'activité de l'oeuvre est essentiellement exposée dans les pages de la collection du Bulletin de l'Oeuvre des Libérées de Saint-Lazare (cotes 137J16 à 23) entre 1873 et 1923. Les autres volumes rassemblant des actes de congrès extérieurs et des périodiques aident à contextualiser cette activité. Le fonds conserve notamment une bibliothèque relative à la condition pénitentiaire féminine.

Inventaire d'archives :

Association Henri-Rollet

Informations sur le producteur :

Notice historique figurant dans le répertoire numérique réalisé par Sylvain Cid du Conservatoire national des archives et de l'histoire de l'éducation spécialisée et de l'action sociale (CNAHES) en 2012 :

L'Association, ou Oeuvre de préservation et de sauvetage de la femme (dite "Oeuvre des Libérées de Saint-Lazare"), est une société philanthropique fondée le 5 février 1870 par Pauline de Granpré, nièce de l'Aumonier de Saint-Lazare à Paris. Saint-Lazare est alors la seule prison pour femmes de la capitale, soulevant par là-même de nombreuses critiques puisqu'elle reçoit "dans un mélange déplorable, au point de vue des conséquences, les prévenues, les condamnées, les jeunes filles de la correction, les récidivistes et les femmes de mauvaise vie" (Revue L'Enfant, n°213, juillet 1913, p. 132-133). La première réalisation de la fondatrice, entourée d'un certain nombre d'amies, est la création d'un Vestiaire de l'oeuvre qui pourvoira en vêtements les femmes rejetées à la rue après leur sortie de prison. Bientôt, les libérées reçoivent des vivres, des vêtements et du travail, elles sont reçues dans des chambres particulières disséminées en ville sous la surveillance des dames patronnesses.

Le parcours de reconnaissance officielle de l'oeuvre est alors initié. En 1874, la société est autorisée par arrêté du préfet de police. En 1877 et 1878, elle perçoit ses premières subventions du Conseil municipal et du Ministère de l'Intérieur. En 1885, elle obtient la reconnaissance d'utilité publique.

L'oeuvre accroît d'abord son activité d'accueil auprès des femmes ayant à faire avec la justice. En 1883, le Patronage n'est plus réservé aux libérées mais s'étend aussi à des prévenues arrêtées sous des inculpations sans gravité et que certains magistrats consentent à confier à la société après abandon des poursuites. C'est ainsi que sur l'initiative d'Isabelle Bogelot, la nouvelle directrice-adjointe de l'oeuvre, un asile temporaire et de convalescence est créé à Billancourt dans la commune de Boulogne-sur-Seine pour recevoir toute cette population de femmes, libérées ou condamnées, ainsi que les enfants des prévenues. En 1903, une nouvelle construction appartenant à la Société est bâtie à l'aide de subventions versées par l'Etat et le Pari mutuel. Les femmes y participent à la tenue du ménage et peuvent sortir la journée pour chercher du travail.

L'activité auprès des prisons se renforce également. Après avoir installé en 1876 son secrétariat, ses dossiers ainsi que ses dames patronnesses rue d'Albouy dans le voisinage de la prison Saint-Lazare, l'oeuvre obtient en 1883 que sa nouvelle directrice générale Madame de Barrau (succédant à la fondatrice) puisse y rencontrer les détenues. En 1887, l'oeuvre est également autorisée à envoyer deux de ses dames patronnesses visiter les prévenues du Dépôt de la Préfecture de police. De là se développent les visites dans les prisons, destinées à encourager les femmes détenues les plus honnêtes ou les plus amendables et à préparer les conditions matérielles de leur sortie autant que leur relèvement moral. En 1914, l'élargissement du champ d'intervention des dames patronnesses à d'autres prisons que Saint-Lazare, notamment le Dépôt, Fresnes, mais aussi Rennes où se trouve une filiale de l'oeuvre, motive un changement de nom de l'Oeuvre des Libérées de Saint-Lazare en Oeuvre de préservation et de sauvetage de la femme.

Au début du XXème siècle, l'oeuvre se tourne de plus en plus vers le patronage spécial des mineures de 13 à 18 ans, délinquantes ou en danger moral. Sous la direction générale de Caroline André, un second "asile" dit "école ménagère" est fondé en 1910 pour recevoir cette fois uniquement des filles mineures envoyées par le juge d'instruction. Une dame de l'oeuvre est spécialement déléguée aux audiences de la 8ème chambre du Palais de justice qui sont consacrées chaque lundi au jugement de ces mineures. Depuis la loi de protection de l'enfance du 19 avril 1898 (article 4), l'oeuvre peut en effet se voir confier pendant le temps de l'instruction des mineures ayant commis un crime ou un délit : on parle de mise en liberté provisoire avec "garde" de l'enfant. Elle accueille aussi des filles envoyées en correction en vertu de l'article 66 du Code pénal, après entente officieuse entre l'autorité judiciaire et l'Administration pénitentiaire. Une mesure conditionnelle de bienveillance interrompt leur séjour ou suspend leur détention effective dans les établissements de Doullens, de Clermont (Oise) ou de Cadillac : on parle alors de libération provisoire après le jugement rendu. Certaines des filles reçues, dites en danger moral, sont encore confiées par le juge "sans que leur détresse morale, trop réelle cependant, ait été de nature à leur faire encourir une sanction judiciaire" (L'Enfant, n°213, juillet 1913, p. 132-133).

Dans les années 1910 et 1920, l'oeuvre est présidée par les ministres Léon Bourgeois puis Louis Barthou.

Le 26 septembre 1936, une révolte éclate dans l'"école ménagère" de Billancourt alors dirigée par l'actrice Marcelle Géniat (1881-1959). Dix-sept jeunes filles s'évadent. Dès le mois d'octobre, Jacques Prévet, auteur du célèbre poème La Chasse à l'enfant qui dénonçait le traitement infligé aux jeunes délinquants de la colonie pénitentiaire de Belle-Ile-en-Mer après leur mutinerie en 1934, écrit un long article dans La Flèche pour défendre les jeunes fugueuses et s'en prend violemment à la directrice de l'établissement. De son côté, Marcelle Géniat en appelle à la création de "centres de triage" destinés à éviter que dans les patronages des filles "améliorables" rejoignent des "compagnes irrémédiablement mauvaises".

Le 19 décembre 1939, un décret préfectoral prononce la dissolution de l'association et entérine l'attribution de tout son actif à l'association "La Tutélaire", décidée en assemblée générale un an plus tôt.



Informations sur l'acquisition :

Historique de conservation :
Les archives de ce fonds ont été préalablement traitées par le Conservatoire national des archives et de l'histoire de l'éducation spécialisée et de l'action sociale. Elles ont été déposées aux Archives départementales en vertu du contrat du 17 mars 2014 signé entre le Département des Hauts-de-Seine et l'association Henri Rollet.

Observations :

FONDS D'ARCHIVES PRIVEES - ASSOCIATIONS

Où consulter le document :

Archives départementales des Hauts-de-Seine

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