1. ARCHIVES DU DOMAINE D'EU. AP/300(II)/1-AP/300(II)/401.
C'est en 1905, date de la vente du château d'Eu par le duc d'Orléans au comte d'Eu, que les
archives du comté et domaine d'Eu furent transférées à Dreux, à part quelques articles qui
avaient été remis au nouveau propriétaire sur sa demande.
Un inventaire en avait été dressé en 1881 par Jules Flammermont (Dans une lettre du 25 mai
1881 il donne des détails sur le classement des archives, qui se faisait à Chantilly, avec
l'aide d'un "auxiliaire qui comptait les pièces. et les timbrait"), archiviste du duc d'Aumale à
Chantilly. Les pièces. des liasses avaient été comptées et portaient chacune un numéro
d'ordre.
Un supplément, qui fut inventorié sans doute lors de l'arrivée du fonds à Dreux, englobait
aussi des archives provenant de l'administration du domaine d'Aumale pendant la gestion par
l'État après les décrets de 1852 et qui dura jusqu'en 1873.
Au total : 366 articles du fonds de Dreux se trouvaient répertoriés lors de l'arrivée des
Archives de la Maison de France aux Archives nationales, en 1969.
Un second supplément non classé fut par la suite pourvu d'un inventaire.
Les propriétaires successifs du comté et du domaine d'Eu avaient toujours attaché un grand
intérêt à la conservation de leurs archives qui forment un ensemble précieux pour l'histoire de
cette importante seigneurie de Normandie. Après les premiers comtes d'Eu, connus depuis 996, le
comté appartint aux Guise et à Mademoiselle de Montpensier, avant de passer par héritage au
prince de Dombes, puis au duc de Penthièvre et, après lui, à la maison d'Orléans.
En souvenir des Guise et aussi parce que l'air marin et les baignades sur la côte proche
pouvaient être bénéfiques pour la santé de ses enfants, Louis-Philippe, duc d'Orléans choisit Eu
comme résidence d'été. Il y invitait en séjour ses ministres et des familiers, et c'est à Eu que
le roi des Français accueillit en 1843 la reine Victoria.
Le fonds contient tout ce que l'on peut attendre d'un chartrier seigneurial : inventaires
anciens, pièces. généalogiques et mémoires historiques, papiers personnels, titres de propriété,
actes féodaux, terriers, comptes, documents concernant les droits de justice, d'usage et autres,
offices, baux et régie de biens, cartes et plans.
Les inventaires analytiques du XVIIIe siècle, constituent une documentation particulièrement
utile et il convient de s'y rapporter pour l'étude de tout ce qui concerne non seulement la
ville et son territoire, mais aussi des fiefs dépendant du comté, des couvents, abbayes et
hôpitaux de la région, et le port du Tréport. Après avoir tiré surtout ses ressources de
l'agriculture, ce pays avait vu fleurir, à partir du XVIIe siècle, une industrie prospère, celle
du verre, à cause de l'apport d'énergie fourni par les cours d'eau et le bois des forêts. Le 26
septembre 1671, les comtes d'Eu s'étaient fait confirmer par lettres patentes de Louis XIV le
droit de disposer de verreries. Quelques liasses concernent l'installation de verreries dans la
vallée de la Bresle et leurs affaires contentieuses.
Une suite importante d'articles a trait à l'exploitation des forêts d'Eu, de Blangy et du
duché d'Aumale. Des mesures de surveillance très rigoureuses, des travaux d'amélioration et une
gestion attentive des coupes permirent une exploitation fructueuse.
Après les décrets de 1852, qui mirent sous séquestre les biens de la maison d'Orléans,
l'administration en fut assurée par les agents de l'État. Grâce à ce fonds, il est permis de
suivre l'exploitation d'une forêt depuis le XVIe siècle jusqu'au début du XXe.
Dans ce chartrier, qui constitue une intéressante documentation pour la seigneurie et le
domaine d'Eu, figurent aussi quelques documents sur le château d'Eu, qui, devenu Hôtel de ville
et Musée municipal, perpétue au cœur de la ville le souvenir des Guise, de la Grande
Mademoiselle, du duc de Penthièvre et de Louis-Philippe et de ses descendants. Cf. également
dans le fonds de Dreux, 300 AP I 1103 à 1105, 1110, 1503 à 1510, 1576 à 1609, 2089 à 2106.
2. ARCHIVES DES DOMAINES DE HAUTE-MARNE (Joinville, Arc et Châteauvillain).
AP/300(II)/402-AP/300(II)/602.
Le chartrier de la principauté de Joinville, du duché de Châteauvillain et des domaines de
Haute-Marne avait été transporté d'Arc-en-Barrois à Dreux avant la dernière guerre.
Les classements anciens ont été réalisés sous deux titres généraux : Joinville et
Châteauvillain, villes de l'ancienne province de Champagne, puis chefs-lieux de canton du
département de la Haute-Marne.
Les origines lointaines de Joinville se trouvent liées à celles de la grande maison
champenoise des Brienne qui, au début du XIe siècle, commença la construction du château.
La dynastie des sires de Joinville, dont le plus célèbre fut le mémorialiste de saint Louis,
s'éteignit au début du XVe siècle avec Marguerite, comtesse de Vaudémont.
Un siècle et demi plus tard la baronnie fut érigée en principauté par Henri II en faveur de
François, duc de Guise. Après la mort de Mlle de Guise, le château et une part importante de la
principauté échurent en 1688 à la Grande Made moiselle et, après elle, à la maison d'Orléans. Le
domaine fut légué par Madame Adélaïde, sœur de Louis-Philippe, à son neveu, le prince de
Joinville.
Quant au duché de Châteauvillain, il avait pour centre une ancienne ville forte, dont la
situation était privilégiée. Entourée de prairies, de terres labourables, très fertiles, de
collines chargées de vignobles, la localité était traversée par une rivière, source d'énergie
pour des moulins et une forge. Les forêts fournissaient le combustible et alimentaient également
une bonne partie de la Bourgogne et du Lyonnais.
Avant d'être dépeuplée par la peste, Châteauvillain connut une certaine activité économique,
grâce à l'industrie du fer et aussi par la présence dans ses murs de marchands drapiers, de
tanneurs et de lardeurs.
Après Jean, sire de Châteauvillain, qui fit construire au début du XIIIe siècle une très belle
église, la ville appartint à Charles d'Orléans, aux comtes d'Avau-gour, branche de la maison de
Bretagne, à la famille de La Baume et au maréchal de Vitry. En 1704, Châteauvillain et Arc
furent adjugés au comte de Toulouse et c'est par le duc de Penthièvre que le duché passa à la
maison d'Orléans.
Au moment du transfert du fonds à Dreux, deux inventaires furent rédigés, qui donnent une
liste des pièces. et des groupes de pièces. Documents seigneuriaux et domaniaux s'échelonnent du
XIIIe au XIXe siècle : lettres patentes des rois de France, titres de propriété, chartes et
traités avec des communes, actes d'acquisition, d'échange et de vente, estimations, aveux et
dénombrements, actes de foi et hommage, terriers, titres de droits d'usage et règlements des
métiers et des foires et marchés, permissions d'édifier ou de réparer des remparts ou des
maisons fortes, registres et pièces. de comptabilité des bois et des terres, inventaires
mobiliers, nombreux documents concernant les forges et les fourneaux dans cette région où
l'industrie du fer prit son essor dès le XIVe siècle et fut particulièrement florissante.
Ces ensembles s'ajoutent aux documents seigneuriaux et domaniaux, conservés dans le fonds de
Dreux (Cf. 300 AP I 710 à 734, 1036, 1376, 1473 à 1502, 2042 à 2088, 2250) à l'inventaire duquel
il convient de se référer pour toute étude sur ces communes ou localités de l'actuel département
de la Haute-Marne. De nombreux articles concernent les domaines de Joinville, Arc et
Châteauvillain, soit qu'ils fissent partie autrefois des archives de l'administration centrale
de la Maison d'Orléans, soit qu'ils aient été transférés au Palais-Royal lors de la reprise en
possession par la duchesse douairière et ses enfants de ces biens.
En dehors de leur intérêt pour l'histoire locale proprement dite, ce fonds est un reflet
fidèle de la vie de cette région, caractérisée par la coexistence d'une économie à la fois
agricole et industrielle.
3. ARCHIVES DES DOMAINES DE SICILE (Palerme et le Zucco).
AP/300(II)/603-AP/300(II)/679.
Les biens de Sicile de Louis-Philippe et de ses descendants n'ont jamais fait partie des
possessions de la maison royale de Naples.
Le duc d'Orléans, qui s'était marié à Palerme le 25 novembre 1809, y loua en janvier 1812 la
maison Sainte-Thérèse (Santa Teresa), dont il occupa avec les siens le second étage, pendant les
travaux d'aménagement effectués à l'appartement d'en bas.
En 1813 et 1814, une première campagne de baux emphytéotiques le rendit propriétaire de fait
de l'immeuble qu'il occupait, d'un autre immeuble contigu et de près de 40 hectares. Toujours
inquiet sur son sort d'exilé, le duc envoya prudemment à la banque Coutts à Londres, les copies
des actes notariés et des titres de propriété. A la maison Sainte-Thérèse il adjoignit un
jardin, qu'il orna de plants européens et tropicaux qu'il fit venir d'Angleterre, comme le
mobilier et les objets nécessaires à l'existence de sa famille, qui s'agrandit par la naissance
en Sicile de trois enfants.
Plus tard, en 1828 et en 1844, Louis-Philippe racheta les cens passifs de ces biens et en
acquit ainsi la propriété absolue. Après 1830, il les avait mis en location et l'administration
en était assurée par l'abbé Francesco Potenzano.
Ce n'est qu'avec le duc d'Aumale que reprit la constitution d'un ensemble typique de la Sicile
et de l'Italie du Mezzogiorno, le En 1853, le duc
avait acquis du prince de Partanna, dans la province de Palerme, le domaine du Zucco, qui
représentait 1.200 à 1.300 hectares de superficie. C'est également le prince qui fit procéder à
l'agrandissement et à l'aménagement du palais de Palerme, qui lui avait été donné par sa mère,
la reine Marie-Amélie, en vertu d'un acte du 5 août 1855. Grâce aux acquisitions de terrains
qu'il effectua alors, le parc prit son étendue définitive (70 hectares). latifundium.
A la mort du duc d'Aumale, en mai 1897, le domaine passa au duc d'Orléans, qui en 1924 fit
vendre le Zucco, considérablement agrandi (2.500 hectares). La partie restante (le parc de
Palerme ou parc d'Orléans) fut cédée par accord amiable par la reine Amélie de Portugal, sœur du
duc d'Orléans et sa légataire universelle, au duc de Guise, qui la conserva jusqu'en 1940.
La partie la plus riche du fonds concerne la période 1880-1925. Confrontés successivement aux
offensives du phylloxéra, du mildiou, puis de la hausse des prix manufacturés et des salaires,
les entièrement orientés vers la grande culture, sont
particulièrement menacés. L'insistance que montre l'administration du duc d'Orléans à vouloir
vendre le Zucco est la preuve de cet état de fait : en 1920, les services financiers de
l'administration ducale calculent que l'intérêt rapporté par le Zucco durant les vingt dernières
années est de 0,38 %. latifundia,
L'administration et la gestion ne se montrent pourtant pas inefficaces, bien au contraire. Le
grand intérêt qu'offrira sans doute l'étude du domaine du Zucco, tient à la rigueur et même au
caractère pointilleux de la gestion.
L'ensemble constitué par la comptabilité, les budgets, et les rapports semble tout à fait
remarquable : homogénéité, continuité relativement bonne de ces documents doivent permettre
d'arriver assez rapidement à donner une idée très précise de la rentabilité du domaine.
Il est certain aussi que les documents concernant le vignoble (notamment trois cartes très
intéressantes sur le développement du phylloxéra en Sicile) sont suffisamment riches pour qu'on
puisse avoir une vision précise des problèmes vinicoles en Sicile à la fin du XIXe siècle et au
début du XXe. En même temps, l'ensemble des documents commerciaux, notamment la correspondance
avec les négociants d'Italie, de France et d'autres pays, devrait permettre de dresser une carte
des circuits de vente. On trouvera aussi dans les documents concernant le personnel, des
renseignements utiles sur les rapports entre l'administration et la population.
Il faut souligner, enfin, l'importance de la correspondance, la très belle série de copies de
lettres, qui offre aussi un riche bagage documentaire qualitatif.
Les archives des domaines de Sicile de la Maison de France présentent un intérêt d'autant plus
grand que les ensembles de documents sur l'administration d'une grande propriété viticole à
cette époque sont rares. Il convient, évidemment, pour les utiliser, de connaître l'italien,
puisqu'une grande partie des papiers est dans cette langue.