Inventaire d'archives : Liquidation des biens des congrégations religieuses : dossiers des établissements (1901-1914)

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Le vote de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations et les congrégations religieuses avait établi une sorte de "Concordat des congrégations"  ; le titre III de cette loi était consacré aux congrégations religieuses :
J.-M. Mayeur. ... Paris, 1966 (Collection Archives). La Séparation de l'Eglise et de l'Etat (1905)
Art. 13. Aucune congrégation religieuse ne peut se former sans une autorisation donnée par la loi qui déterminera les conditions de son fonctionnement.
Elle ne pourra fonder aucun nouvel établissement qu'en vertu d'un décret rendu en Conseil d'Etat. La dissolution de la congrégation ou la fermeture de tout établissement pourront être prononcées par décret rendu en Conseil d' Etat.
Art. 14. Nul n'est admis à diriger, soit directement, soit par personne interposée, un établissement d'enseignement de quelque ordre qu'il soit, ni à y donner l'enseignement, s'il appartient à une congrégation religieuse non autorisée...
Art. 16. Toute congrégation formée sans autorisation sera déclarée illicite.
Art. 18. Les congrégations existantes au moment de la promulgation de la présente loi, qui n'auraient pas été antérieurement autorisées ou reconnues, devront, dans les délais de trois mois, justifier qu'elles ont fait les diligences nécessaires pour se conformer à ces prescriptions. A défaut de cette justification, elles sont réputées dissoutes de plein droit. Il en sera de même des congrégations auxquelles l'autorisation aura été refusée...
Art. 20. Un règlement d'administration publique déterminera les mesures propres à assurer l'exécution de la présente loi.
Cette loi imposait donc aux congrégations une autorisation préalable, sous peine de dissolution ou d'interdiction.
Les élections législatives de 1902 se firent pour ou contre la loi sur les associations ; elles débouchèrent sur la formation du ministère Combes, dont on pense généralement qu'il qu'il dévia le sens de la loi sur les associations en l'appliquant à l'égard des congrégations religieuses avec une grande rigueur, en fermant les écoles congréganistes fondées avant 1901, écoles souvent non autorisées de congrégations elles-mêmes autorisées. Un commission fut nommée à la Chambre des députés sous la présidence de Fernand Buisson , qui fonctionna de 1902 à 1905. Pour les congrégations d'hommes, un avis du Conseil d'Etat avait examiné précédemment quels étaient les congrégations ayant le droit de se dire autorisées ; elles étaient au nombre de cinq : les associations de Saint-Lazare, des Missions Etrangères, des prêtres de Saint-Sulpice, des Frères des Ecoles chrétiennes et des prêtres du Saint-Esprit. Les demandes en autorisation formées par les congrégations furent repoussées, et la loi du 7 juillet 1904 supprima l'enseignement congréganiste :
Voir l'inventaire des articles C 7259 à 7275 : Commission des associations et congrégations religieuses. A
Art. 1er. L'enseignement de tout ordre et de toute nature est interdit en France aux congrégations. Les congrégations autorisées à titre de congrégations exclusivement enseignantes seront supprimées dans un délai maximum de dix ans.
Il en sera de même des congrégations et des établissements, qui, bien qu'autorisés en vue de plusieurs objets, étaient, en fait, exclusivement voués à l'enseignement, à la date du 1er janvier 1903.
Les congrégations qui ont été autorisées et celles qui demandent à l'être, à la fois pour pour l'enseignement et pour d'autres objets, ne conservent le bénéfice de cette autorisation ou cette instance d'autorisation que pour les services étrangers à l'enseignement prévus par leurs statuts.
Art. 5. Par jugement du tribunal du siège de la maison-mère, rendu à la requête du procureur de la République, le liquidateur, nommé aussitôt après la promulgation de la loi, sera chargé de dresser l'inventaire des biens des congrégations, lesquels ne pourront être loués ou affermés sans son consentement, d'administrer les biens des établissements successivement fermés et de procéder à la liquidation des biens et valeurs des congrégations dissoutes dans les conditions de la présente loi.
La liquidation des biens et valeurs, qui aura lieu après la fermeture du dernier établissement enseignant de la congrégation, s'opérera d'après les règles édictées par l'article 7 de la loi du 24 mai 1825...
Toute action en reprise ou en revendication devra, à peine de de forclusion, être formée contre le liquidateur dans un délai de six mois, à partir du jour fixé pour la fermeture de l'établissement.
Passé la délai de six mois, le liquidateur procédera à la vente en justice de tous les immeubles et objets mobiliers qui n'auraient pas été repris ou revendiqués, sauf exception pour les immeubles qui étaient affectés, avant la promulgation de la présente loi, à la retraite des membres actuellement vivants de la congrégation, agés ou invalides, ou qui seront réservés pour cet usage par le liquidateur...
Ces textes législatifs eurent pour conséquence la liquidation des biens des congrégations religieuses dont les dossiers, classés par cours d'appel, sont conservés dans la sous-série BB30 (BB30 1615 à 1680) ; il manque les cours d'appel de Riom, Rouen et Toulouse. Ces dossiers proviennent du service des Affaires civiles et du Sceau du ministère de la Justice.
Le dossier concernant chaque congrégation ou établissement congréganiste est formé de plusieurs sous-dossiers de nombre et d'importance variable :
-nomination du liquidateur ;
-états de situation de la liquidation ;
-demandes de restitution de dots par les religieuses ;
-demandes de secours formées par les congréganistes ;
-honoraires des liquidateurs ;
-situation des religieuses agées ou infirmes ;
-actions en revendication ;
-renseignements sur les religieux ;
-divers jugements et arrêts rendus par les cours ou les tribunaux ;
-homologation des comptes de la liquidation.
En règle générale, on trouve peu de renseignements sur les incidents auxquels ont donné lieu les fermetures d'établissements congréganistes.
Les états de situation de la liquidation de l'établissement sont en général très intéressants ; ce sont des tableaux comportant plusieurs rubriques : date de la publication du jugement, principales opérations auxquelles la liquidation a donné lieu, cause du retard de la liquidation éventuellement, date de prévision de la fin de la liquidation, observations diverses. Ces états sont trimestriels et figurent dans presque tous les dossiers ; ils remontent souvent jusqu'à l'année 1904.
Les établissements congréganistes se retrouvent souvent classés dans le ressort de la cour d'appel de la maison-mère de l'ordre (surout pour les ordres religieux importants : clercs du Saint-Viateur, Petites soeurs de l'Assomption, Augustines etc.). Cette règle n'est pas générale ; ainsi les Ursulines ou les Carmélites figurent dans chaque cour d'appel.
Les papiers conservés dans la sous-série BB reflètent parfaitement les dispositions définies par l'article 5 de la loi du 7 juillet 1904 quant à la liquidation des biens meubles et immeubles des congrégations. 30
Certains dossiers ont été communiqués en 1909 à la Commission d'enquête sénatoriale ; parfois les dossiers ont bien été renvoyés au directeur des Affaires civiles et du Sceau, mais quelquefois, il ne reste plus que le bordereau des documents envoyés à la Commission du Sénat.
Dans la sous-série F19 (Cultes), un groupe documentaire, coté F19 7927 à 8010, s'intitule : "Dossiers relatifs aux congrégations et établissements congréganistes précédemment autorisés, supprimés en application de la loi du 1er juillet 1901 ou de la loi du 7 juillet 1904" ; on pourrait supposer qu'il s'agit de dossiers relatifs à la liquidation des congrégations religieuses ; en réalité, ces dossiers sont constitués par deux ensembles de documents, le premier relatif à la fondation de l'établissement, aux achats de bâtiments etc., le seond, d'un intérêt inégal, ne peut comporter que la seule notification de l'arrêté de fermeture, quelquefois des pièces relatives à la demande en autorisation toujours rejetées, et des documents concernant les incidents qui ont marqué la fermeture de l'établissement. Seules étaient concernées les congrégations enseignantes féminines. La sous-série des Cultes n'offre donc que des ressources limitées quant à la liquidation des congrégations religieuses au début du siècle.
Nous avons déjà évoqué la commission formée au sein de la Chambre des députés pour examiner les demandes en autorisation formées par les congrégations religieuses entre 1902 et 1905 ; les papiers issus de cette commission, conservés sous les cotes 7259 à 7275, concernent les congrégations d'hommes ensignantes et prédicantes, et les Chartreux qualifiés de congrégation commerçante, et 81 congrégations enseignâtes de femmes sur les 395 constituant les 1619 établissements qui ont formé des demandes en autorisation. A
L'administration de l'Enregistrement, des Domaines et du Timbre avait des attributions multiples ; en dehors des obligations fiscales qui lui incombaient, elle pouvait être chargée, en vertu de lois spéciales, de remplir certaines fonctions, par exemple, la liquidation des biens des congrégations, et le sequestre des biens de l'Eglise à la suite de la loi de Séparation. Les archives du ministère des Finances ne font plus partie des collections des Archives nationales, néanmoins le lecteur peut se reporter à l' pour repérer dans la sous-série F33 les groupes documentaires qui intéressent la liquidation des congrégations : Etat sommaire des versements des ministères
F 1427 à 1515. Papiers relatifs à la liquidation des congrégations (classement par ordres). 33*
F 512 à 612. Liquidations : dossiers des congrégations (classement départemental d'après le siège de la maison-mère de l'ordre). 1910-1921. 33
F 1097 à 1264. Affaires concernant les biens ecclésiastiques sequestrés et ceux des congrégations religieuses : instances (classement par départements, suivant le département de la maison-mère). 33
Décembre 1989 J. CHARON-BORDAS

Cote :

BB/30/1614-BB/30/1680

Publication :

Archives nationales
1989

Localisation physique :

Pierrefitte

Identifiant de l'inventaire d'archives :

FRAN_IR_002356

Archives nationales

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