Inventaire d'archives : Papiers Christian Fouchet
Contenu :
: cartons (97 AJ 1-65), 7 mètres linéaires.
Importance matérielle
: protocole de remise, 2008-2010.
Modalités d'entrée
Homme politique et diplomate français, Christian Fouchet est né le 17 novembre 1911 à Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise, auj. Yvelines), où il grandit 2, rue de Metz.
Licencié en droit, diplômé d'études supérieures d'économie politique et de l'École libre des sciences politiques, il est mobilisé en août 1939 et muté, sur sa demande, dans l'aviation. Il termine son stage d'observateur aérien à Mérignac lorsque, le 17 juin 1940, il entend le discours du maréchal Pétain annonçant l'armistice. Deux heures après, il s'échappe de la base aérienne à bord d'un avion anglais, gagne Londres et se met aux ordres du général de Gaulle qui vient de lancer son appel.
En Grande-Bretagne, Christian Fouchet parfait son instruction et son entraînement avec les premiers volontaires des Forces aériennes françaises libres au Pays de Galles, dans les écoles de Saint-Atham (juin-novembre 1940) puis d'Odiham (après novembre 1940), avant de gagner la base de Camberley en tant que sous-lieutenant.
En décembre 1941, par décision du général de Gaulle, il est détaché au commissariat national à l'Intérieur, au Travail et à l'Information en qualité de correspondant de guerre dans le Proche-Orient. Le mois suivant, il part en Égypte où il obtient un passeport pour l'Afrique du Sud via l'Ouganda, le Kenya, le Tanganyika, la Rhodésie et le Mozambique (mai-juillet 1942) et le grade de lieutenant (15 juin). On le trouve au Caire au milieu de l'été. À la fin de l'année, il est mandaté au Tchad sous les ordres du général Leclerc et fait campagne dans le massif du Tibesti puis dans le Fezzan, en Libye. Ses comptes rendus d'opérations militaires, écrits en premières lignes et transmis par radio, sont souvent les premiers documents français sur les opérations en cours. Affecté ensuite dans le 1
bataillon d'infanterie de l'Air des Forces françaises libres (juin-juillet 1943), il passe son brevet de parachutiste puis, avec le grade de capitaine, est appelé à l'état-major supérieur de l'Air à Alger, qui l'envoie réaliser des missions en Italie, en Suisse et en URSS.
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Le décret du 26 avril 1944 l'intègre dans les cadres du ministère des Affaires étrangères ; il entre au Quai le 17 août suivant. Il obtient alors ses premières missions diplomatiques, en Russie tout d'abord où il est nommé secrétaire de l'ambassade de France à Moscou, puis en Pologne, en décembre 1944, comme délégué de la République française auprès du gouvernement provisoire polonais à Lublin. Il y organise le regroupement et le ravitaillement des milliers de prisonniers et déportés français libérés par l'armée soviétique. Premier occidental à pénétrer dans Varsovie incendiée et ruinée, il est aussi le premier occidental à renouer avec la Pologne des liens diplomatiques qui donnent alors à la France une réelle avance sur les autres pays de l'Ouest.
Lorsque la délégation française fait place à une ambassade, en septembre 1946, il est nommé consul général de France à Calcutta, avec juridiction sur l'Inde entière et la Birmanie, et délégué du gouvernement français auprès du gouvernement de Delhi. Il mène avec le Pandit Nerhu la délicate discussion relative à l'ouverture des relations diplomatiques franco-indiennes et négocie le libre passage par les Indes du ravitaillement du corps expéditionnaire français en Indochine.
À son retour en France en avril 1947, il demande au Quai d'Orsay sa mise en disponibilité pour se consacrer au nouveau parti gaulliste, le Rassemblement du Peuple Français (RPF). Membre du conseil de direction du mouvement, il est d'abord secrétaire général administratif, puis délégué général pour la région parisienne. Responsable de la fameuse campagne du timbre de 1948, il est chargé d'organiser toutes les grandes manifestations dans la région parisienne. Élu aux élections législatives de juin 1951 dans la 3
circonscription de la Seine, il devient, à l'Assemblée nationale, membre de la commission des Affaires étrangères (qu'il laisse en janvier 1954 pour la commission des Finances) et vice-président du groupe RPF en juin 1953. Il intervient à cette période fréquemment sur les problèmes d'Afrique du Nord et d'Indochine.
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En juin 1954, il accepte le poste de ministre des Affaires marocaines et tunisiennes que lui propose le nouveau Président du Conseil, Pierre Mendès France, avec autorité sur les résidents généraux de France en Tunisie et au Maroc, qui relevaient jusqu'à cette date du ministre des Affaires étrangères. Il négocie l'autonomie interne de la Tunisie et quitte ses fonctions en février 1955.
Il vit ensuite une courte « traversée du désert » puisque ce n'est qu'en octobre 1958 qu'il est nommé ambassadeur de France au Danemark. Parallèlement, à la demande du général de Gaulle, il préside le comité chargé d'étudier le projet d'union politique de la Communauté économique européenne, donné sans suite, aussi connu sous le nom de « Plans Fouchet ».
Après les accords d'Évian (19 mars 1962), le chef de l'État lui confie le poste délicat de haut-commissaire en Algérie, qu'il occupe jusqu'à l'indépendance du pays, le 5 juillet suivant. Il revient alors en métropole comme ministre délégué auprès du Premier ministre, Georges Pompidou, chargé de l'Information (septembre-novembre 1962).
Lors du remaniement ministériel de novembre 1962, il devient ministre de l'Éducation nationale. Il demeure rue de Grenelle jusqu'en avril 1967, date à laquelle le général de Gaulle lui propose le ministère de l'Intérieur. Lorsqu'éclatent les événements de Mai 68, il est place Beauvau. Le 31 mai 1968, il quitte le gouvernement pour ne plus y revenir.
Député de Meurthe-et-Moselle sous l'étiquette de l'Union des Démocrates pour la V
République (UD-V
) du 12 mars au 7 mai 1967, il poursuit sa carrière législative en juin 1968 sous les couleurs de l'Union pour la Défense de la République (UDR) avant de fonder, en décembre 1972, son propre parti, le Mouvement pour l'Avenir du Peuple Français.
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Réélu député aux élections législatives de mars 1973, Christian Fouchet décède le 11 août 1974 d'une crise cardiaque à Genève, après avoir été un éphémère candidat aux élections présidentielles.
Il semble que Christian Fouchet ait emporté avec lui l'essentiel de ses dossiers à chaque départ de fonctions. Conservés à son domicile, ils l'ont vraisemblablement suivi au cours de ses déménagements. À sa mort, en 1974, son épouse a pris contact avec les Archives nationales mais le versement ne s'est pas fait. Le fonds n'y a été remis qu'en juillet 2008, à la suite de nouveaux contacts établis entre la Section du XX
siècle des Archives nationales (Pascal Geneste) et Madame Colette Fouchet.
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Ces papiers sont d'une grande richesse documentaire, aussi bien sur le plan personnel que professionnel.
Une large série d'agendas très détaillés couvre la période 1944-1974 et révèle l'emploi du temps, les déplacements et les activités du diplomate devenu ministre. Quelques documents témoignent de l'enfance et de la jeunesse, mais l'essentiel des documents privés relèvent de la correspondance ou de la documentation.
Pour le reste, le contenu donne un bon aperçu de l'ensemble de la carrière publique de Christian Fouchet. Toutes ses fonctions sont représentées, même si l'on constate une assez grande disparité de la production documentaire selon les postes occupés.
L'ensemble relatif aux affaires marocaines et tunisiennes est ainsi très complet et varié (correspondance et télégrammes avec les collaborateurs, notes au ministre, conventions, interpellations, mouvements nationaux - fellaghas, néo-Destour, Abdelkrim El Khattabi
-, photographies). En revanche, la période des ministères de l'Information, de l'Éducation nationale et de l'Intérieur est surtout couverte par des revues de presse ou de la documentation, sans notes des collaborateurs.
Abdelkrim El Khattabi (1882-1963) fut le chef d'un mouvement de résistance marocaine contre la France et l'Espagne lors de la Guerre du Rif (1921-1926), puis l'icône des mouvements indépendantistes luttant contre le colonialisme. Prisonnier de guerre, il s'évade en 1947 et passe la fin de sa vie en Égypte, où il préside le « Comité de libération pour le Maghreb arabe ».
Les dossiers produits dans les postes diplomatiques sont également hétérogènes : s'il faut signaler l'intéressante correspondance sur la délégation française auprès du gouvernement polonais à Lublin et un dossier sur l'Organisation de l'Armée secrète et l'affaire Salan au moment du haut-commissariat en Algérie, les dossiers sur le séjour à Copenhague ne présentent pas un intérêt historique majeur, si ce n'est l'illustration du protocole diplomatique.
Les documents relatifs au député Christian Fouchet illustrent son implication à la fois locale et nationale. Ses fonctions importantes au sein du RPF s'y retrouvent parmi les pièces relatives au fonctionnement interne du parti, notamment de la commission des Affaires étrangères. Après 1967, peuvent être évoqués l'histoire du mouvement gaulliste, de ses débats internes et, plus particulièrement, le parcours d'un « gaulliste orthodoxe ».
L'intérêt éprouvé par Christian Fouchet pour les questions européennes dépasse, bien souvent, le simple cadre professionnel. Même après l'échec des plans Fouchet, il continue à s'intéresser de près aux questions européennes et intervient comme député ou simple spécialiste sur des sujets comme l'entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun en 1973 ou le projet de référendum de 1974.
Enfin, avant son décès subit, Christian Fouchet eut le temps de rédiger ses mémoires. L'ensemble des manuscrits, notes et épreuves est conservé. Homme de lettres et témoin méticuleux, il offre ainsi une série de témoignages éclairant avec force et sensibilité l'histoire vécue aux côtés du général de Gaulle.
Le classement au dossier s'est fait suivant un plan de classement qui comporte cinq grandes parties : les documents personnels, l'activité publique, le militant gaulliste, Fouchet et l'Europe et, enfin, les mémoires et témoignages. Le choix de ce découpage répond au statut mixte (public et privé) des fonds personnels de ministres.
La carrière publique de Christian Fouchet met en évidence ses différentes fonctions dans le respect de l'ordre chronologique.
Ses dossiers de député ont fait l'objet d'un traitement particulier : ses choix et interventions en matière de politique nationale et internationale ont été placés avant son action locale, en Lorraine, afin de faciliter une appréhension globale de ses principes et de sa ligne de conduite.
Il en est de même pour la partie « Fouchet et l'Europe » : il s'agit là d'un intérêt récurrent et, le plus souvent, indépendant de ses fonctions publiques, qui constitue un axe à part entière.
Ses mémoires ont été délibérément placés en fin de fonds. Bien que pensés très tôt, leur rédaction n'intervient qu'après qu'il a quitté ses fonctions publiques. Ils apparaissent ainsi comme le bilan et la réflexion personnelle sur la carrière d'un homme d'État.
SOMMAIRE
Archives privées
97 AJ 1 - 9
Papiers personnels de jeunesse et de guerre
97 AJ 1
Agendas
97 AJ 2 - 5
Correspondance personnelle
97 AJ 6
Carrière
97 AJ 7
97 AJ 8Cote vacante
Décès
97 AJ 9
Activités publiques
97 AJ 10 - 47
Premières missions diplomatiques (Alger, Moscou, Lublin, Calcutta)
97 AJ 10
Ministre des Affaires marocaines et tunisiennes
97 AJ 11 - 29
Ambassadeur de France au Danemark
97 AJ 30 - 33
Haut-commissaire de la République en Algérie
97 AJ 34 - 35
Ministre délégué à l'Information auprès du Premier ministre
97 AJ 36
Ministre de l'Éducation nationale
97 AJ 37 - 44
Ministre de l'Intérieur
97 AJ 45 - 47
Militant et député gaulliste
97 AJ 48 - 55
Rassemblement du Peuple Français
97 AJ 48 - 49
Union pour la Défense de la République
97 AJ 50
Mouvement pour l'Avenir du Peuple Français
97 AJ 51
Campagnes électorales et l'action locale
97 AJ 52 - 55
Réflexions sur l'Europe
97 AJ 56
Mémoires et témoignages
97 AJ 57 - 60
Photographies
97 AJ 61 - 65
Cote :
97AJ/1-97AJ/65
Publication :
Archives Nationales
Ressources complémentaires :
Références bibliographiques :
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
Pour compléter cette orientation bibliographique, voir les ouvrages de la bibliothèque de Christian Fouchet listés en annexe 2.
ANDRIEU (Claire), BRAUD (Philippe), PIKETTY (Guillaume), dir.,
, Paris, Robert-Laffont, collection « Bouquins », 2006.
Dictionnaire De Gaulle
BADACHE (Daniel-Charles), « Les positions institutionnelles des gaullistes depuis 1959 »,
, 1984, vol. n° 4, p. 558-559.
Revue française de sciences politiques
BERSTEIN (Serge),
, Paris, Perrin, 2002.
Histoire du gaullisme
BON (Frédéric) et ROYER (Jean), « Les élections partielles de l'été 1970, analyse des électorats »,
, 1971, vol. 21, n° 1, p. 7-102.
Revue française de sciences politiques
BROCHE (François), CAÏTUCOLI (Georges), MURACCIOLE (Jean-François), dir.,
, Paris, Robert-Laffont, collection « Bouquins », 2010.
Dictionnaire de la France libre
CLAOUÉ (Mathieu),
, mémoire de master 2 (dir. Maurice VAÏSSE), Institut d'études politiques de Paris, 2009.
Christian Fouchet ministre des Affaires marocaines et tunisiennes dans l'ombre de Pierre Mendès France (18 juin 1954-5 février 1955). De l'Empire à l'empirisme colonial français
COINTET (Michèle),
, Paris, Perrin, 1995.
De Gaulle et l'Algérie française
CRÉMIEUX-BRILHAC (Jean-Louis),
, Paris, Gallimard, 1996.
La France libre. De l'appel du 18 juin à la Libération
DARD (Olivier),
. Paris, Perrin, 2005.
Voyage au cœur de l'OAS
DURANTON-CRABOL (Anne-Marie),
. Paris, éditions Complexe, 1995.
Le temps de l'OAS
ELGEY (Georgette),
. Paris, Fayard, 3 t., 1992, 1997 et 2008.
Histoire de la IVe République. La République des tourmentes (1954-1959)
, « Christian Fouchet, 1911-1974 ». Paris, Plon, n° 45, décembre 1983.
Espoir, Revue de l'Institut Charles de Gaulle
FONDATION DE GAULLE ET UNIVERSITÉ DE BORDEAUX III,
, Paris, Armand-Colin, 1998.
De Gaulle et le RPF, 1947-1955
FONDATION DE GAULLE,
, Paris, Plon, collection « Espoir », 2005.
Charles de Gaulle et la jeunesse
LACHAISE (Bernard), « Christian Fouchet », dans
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LACOUTURE (Jean),
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Pierre Mendès France
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reRevue française de sciences politiques
PIERRON (Jean-Louis), « La mission de Christian Fouchet en Pologne (29 décembre 1944-31 mars 1945) », dans
, 1991, n° 63, p. 75-90.
Guerres mondiales et conflits contemporains
PROST (Antoine),
, t. IV de
. Paris, Nouvelle librairie de France, 1981.
L'école et la famille dans une société en mutation (1930-1980)L'histoire de l'enseignement et de l'éducation en France
ROUSSEL (Éric),
. Paris, Gallimard, 2002.
Charles de Gaulle
ROUSSEL (Éric),
. Paris, Gallimard, 2007.
Pierre Mendès France
VAÏSSE (Maurice),
. Paris, Fayard, 1998.
La Grandeur. Politique étrangère du général de Gaulle (1958-1969)
Localisation physique :
Pierrefitte
Identifiant de l'inventaire d'archives :
FRAN_IR_027968