Page d'histoire : Jacques Vaucanson Grenoble, 24 février 1709 - Paris, 21 novembre 1782

Portrait de Jacques Vaucanson, élu pensionnaire de l’Académie royale des sciences le 9 juin 1768
huile sur toile de Joseph Boze, vers 1782-1783, donnée par l’artiste à l’Académie des sciences en 1784
Paris, Académie des sciences
© Académie des sciences – Institut de France

Jacques Vaucanson est une personnalité parfaitement ancrée dans l’esprit des Lumières, par sa grande curiosité comme par ses centres d’intérêt. Par ses compétences mécaniciennes, il est aussi singulièrement proche des premiers ingénieurs de l’ère industrielle. Toute sa vie durant, il poursuivra le même but, le grand dessein qu’il ne pourra pas réaliser : construire un homme artificiel.

Dès ses études chez les Minimes de Lyon, Vaucanson avait manifesté son intérêt pour deux domaines : la « mécanique » et la « médecine ». Mais il choisit une voie fort différente, l’exhibition publique, en se lançant dans la construction de plusieurs automates vite célèbres. Le Joueur de flûte, réalisé en 1738, représente un berger assis qui joue réellement de la flûte traversière avec des mouvements de bras, de lèvres et de doigts. Avec son deuxième automate, Le Canard digérateur, Vaucanson s’attaque à la motricité, par le mouvement des ailes, et à l’imitation de la manducation et de la digestion. On saura plus tard que la digestion n’était en fait qu’un artifice.

Ses automates attirent, grâce à leur succès, l’attention des milieux scientifiques, du public et du roi lui-même sur ce « mécanicien de génie ». En 1739, le roi lui confie la mission de réorganiser l’industrie française de la soie, ce qui lui donne l’occasion de confronter ses talents de mécanicien aux réalités économiques et sociales. En tentant de normaliser les actes, les gestes des ouvriers, ainsi que les dimensions des pièces de machines, il trouve un terrain de recherche qui le pose en précurseur du vaste mouvement de standardisation et d’organisation des ateliers qui se développera au XIXe siècle.

Les réalisations qu’il met en œuvre pour résoudre ses nombreux problèmes techniques sont de tout premier ordre. Pour construire son moulin à organsiner, doté d’une transmission par chaîne, il invente une ingénieuse machine à fabriquer la chaîne, manœuvrable par un ouvrier sans qualification. Pour usiner les calandres à écraser la soie, il met au point le premier tour à charioter en fer ; enfin, il construira le premier métier à tisser entièrement automatique. Cette évolution, du mécanicien au fabricant d’automates puis à l’organisateur, préfigure l’ingénieur du siècle suivant. Vaucanson participera aussi directement au projet du Conservatoire des arts et métiers, qui verra le jour à Paris en 1794. Ses machines y sont aujourd’hui conservées et exposées dans les salles du Musée des arts et métiers.

Bruno Jacomy
conservateur en chef,
musée des Confluences, Lyon

Source: Commemorations Collection 2009

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