Page d'histoire : Louis Couperin devient organiste de l'église Saint-Gervais Paris, 9 avril 1653

Le buffet de l'orgue de Saint-Gervais
© Ville de Paris, service audiovisuel / Maucotel / Walter

Le 9 avril 1653, Louis Couperin est titularisé organiste de l’église Saint-Gervais, premier de la famille à occuper cette tribune que la dynastie des Couperin allait illustrer presque deux siècles durant. Il semble en effet que l’orgue de Saint-Gervais ait été considéré comme l’apanage artistique de la famille. Ainsi, lorsque meurt Charles Couperin, frère et successeur de Louis, son fils François étant encore trop jeune, Delalande assurera l’intérim ; mais il remettra à François, qui n’est pas encore « le Grand », un flambeau qui ne s’éteindra que vers 1830, avec la dernière descendante des Couperin organistes, Céleste Thérèse.

En compagnie de ses deux frères musiciens, Louis avait laissé le village familial de Chaumes-en-Brie pour s’établir à Paris vers 1650. Violoniste, violiste, claviériste, son talent et ses dons le font vite remarquer. Une brillante carrière parisienne s’ouvre au jeune homme qui, alors qu’il accède à l’orgue de Saint-Gervais, entre à la Chambre du Roi comme dessus de viole. Il s’y trouve mêlé de près aux premières représentations de ballets et d’opéras italiens. Ami des artistes, reconnu par la ville et « fort goûté » à la cour, il est appelé à suivre le long voyage de la Cour à Saint-Jean-de-Luz. Mais il s’éteint prématurément, à Paris, âgé de 35 ans.

À la fin du siècle, l’abbé Le Gallois notera que le musicien « avait excellé par la composition, c’est-à-dire par ses doctes recherches. Et cette manière de jouer a esté estimée par les personnes sçavantes, à cause qu’elle est pleine d’accords et enrichie de belles dissonances, de dessein et d’imitation ». Mais faute d’avoir été publiée de son vivant, son oeuvre n’est connue que fragmentairement. A-t-il composé pour la Chambre du Roi ? On l’ignore et seules subsistent, en ce domaine, quelques fantaisies et sinfonies pour les hautbois ou les violes.

C’est comme compositeur pour le clavier qu’il est passé à la postérité. Les quelque 130 pièces qu’il a destinées au clavecin l’ont d’emblée placé au rang des plus grands. Père fondateur, après Chambonnières, de l’école française de clavecin, il semble qu’il ait joué à l’orgue un rôle comparable. Longtemps inconnue, l’oeuvre qu’il écrivit pour Saint-Gervais a été retrouvée en 1958, en un cahier manuscrit rassemblant 70 pièces. À l’apogée de l’éphémère baroque français, cet admirable corpus demeure, hélas ! toujours inédit. Au siècle de Georges de la Tour et des frères Le Nain, le musicien mélancolique s’y révèle un maître de l’éclairage intime et des clairs-obscurs de l’âme.

Gilles Cantagrel
musicologue, membre du Haut comité des célébrations nationales

Source: Commemorations Collection 2003

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