Page d'histoire : Jean-Baptiste Dumas Alès, 16 juillet 1800 - Cannes, 11 avril 1884

Jean-Baptiste Dumas 

Après les temps fondateurs de Lavoisier, Jean-Baptiste Dumas figure parmi ceux qui ont contribué à transformer la chimie en science théoriquement fondée, aux implications industrielles immenses. Il est un novateur incontestable en chimie des colorants, en chimie organique, en métallurgie.

Né à Alès, il émigre à Genève en 1816 et s'y forme à la chimie et aux sciences naturelles entre Pictet et Candolle. Il gagne Paris, en 1823, et fonde dès 1824, avec Adolphe Brongniart et Victor Audoin, les Annales de sciences naturelles ; il est répétiteur de Thénard à l'École polytechnique et aussi industriel malheureux d'une usine de teinture. En 1826, il épouse une sœur de Brongniart. Son beau-père est le minéralogiste Alexandre Brongniart, fils de l'architecte de la Bourse, ami de Cuvier, directeur de la Manufacture de Sèvres (1800), professeur au Muséum (1822). Tout est en place pour permettre à Dumas une triple carrière de chimiste, de politique et de conseiller influent de Louis Pasteur.

Chimiste "pratique", Dumas élucide, dès 1827, la structure des composés organiques, propose la formulation correcte des différents alcaloïdes, une méthode de mesure des poids moléculaires, la détermination précise du poids atomique du carbone ; en 1834, la théorie des substitutions. Le volume I du Traité de chimie appliquée aux arts précède d'une année la création, en 1829, de l'École centrale des arts et manufactures, où il enseigne jusqu'en 1852 ; en 1836, il publie La philosophie chimique ; à partir de 1840, il est un des éditeurs des Annales de chimie et de physique. Il succède à Thénard à Polytechnique en 1835, à Duyeux à l'École de Médecine en 1839, à Gay-Lussac à la Sorbonne où il enseigne déjà en 1852. Il est élu à l'Académie des sciences en 1832, à l'Académie française en 1876.

Sa seconde vie commence en 1848. Député de Valenciennes, il sera ministre de l'agriculture de 1850 à 1851, sénateur d'Empire, mais aussi, plus longuement, membre actif du conseil municipal de Paris qu'il préside en 1859. Eau, égouts, électricité, ceinture verte déjà..., le chimiste-urbaniste œuvre avec le baron Haussmann pour la transformation de la capitale.

Enfin, le savant-politique, le natif d'Alès, propose - impose - à Pasteur, en 1865, l'enquête sur la maladie des vers à soie qui décime les magnaneries et met en péril l'économie du Midi. La confiance de Dumas dans la méthode du chimiste appliquée aux pathologies animales, la rencontre de la chimie et de la physiologie qu'il a lui-même expérimentée (recherches sur les graisses animales), seront une des origines de la microbiologie. De 1840 à 1884, Pasteur adresse une centaine de lettres à Dumas : signes d'un dialogue scientifique fondateur.

Claire Salomon-Bayet
professeur émérite à la Sorbonne
membre du Haut Comité des célébrations nationales

Source: Commemorations Collection 2000

Liens