Page d'histoire : Débuts de la Visitation Sainte-Marie Annecy, 6 juin 1610

Saint François de Sales remet leurs constitutions aux visitandines Huile sur toile (déb. XVIIIe s.)
© Moulins, Musée de la Visitation

La Visitation est le fruit de la rencontre entre François de Sales (15671622), évêque de Genève en résidence à Annecy, et Jeanne-Françoise Frémyot de Chantal (1572-1641), jeune veuve et mère de famille issue de la magistrature bourguignonne. Ils fondèrent le premier monastère à Annecy (duché de Savoie) le 6 juin 1610 selon un modèle original qui tentait de rompre avec l’idée que, pour les femmes, la vie religieuse devait nécessairement se dérouler en clôture. Les premières constitutions de l’ordre (1613), probablement inspirées de modèles italiens, n’imposaient que des vœux simples (le retour à la vie laïque était donc possible) et les religieuses vouées d’abord à l’oraison pouvaient également sortir du monastère pour visiter pauvres et malades, prendre part à des cérémonies religieuses, tenir de petites écoles, voire régler des affaires personnelles. Ainsi, la première Visitation associait vie contemplative et vie active, prière et charité. Mais lorsque les fondateurs envisagèrent l’installation d’un deuxième monastère à Lyon, ils durent se plier aux exigences de l’archevêque du lieu, Denis de Marquemont, puisque chaque maison de l’ordre était placée sous l’autorité de l’ordinaire. C’est alors que les Visitandines furent ramenées à une vie plus conforme au modèle traditionnel des moniales, avec l’établissement de la clôture stricte et des vœux solennels. La nouvelle règle fut approuvée par le pape Paul V en 1618. Il reviendrait à Vincent de Paul et à Louise de Marillac, une vingtaine d’années plus tard, d’ouvrir la voie vers une forme de vie consacrée féminine plus souple et plus ouverte sur le siècle. Dès lors la Visitation apparut avant tout comme un ordre contemplatif porté par « l’invasion mystique » (Henri Bremond) qui gagna en particulier les élites sociales au cours du premier XVIIe siècle, un ordre un peu moins austère que le Carmel dont il recueillait les vocations qui n’auraient pu s’y adapter. La spiritualité de la Visitation mettait l’accent sur l’humilité, la charité et la douceur. À la fin du XVIIe siècle, avec Marguerite-Marie Alacoque, le monastère de Paray-le-Monial (actuellement en Saône-et-Loire) devint un foyer majeur de la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus, marquée d’une forte tonalité pénitentielle et réparatrice, et fortement liée à la vénération pour la personne du roi. Les Visitandines accueillaient des jeunes filles qui, durant quelques années de pensionnat, venaient parfaire leur éducation avant le mariage. Elles louaient également, dans l’enceinte de leurs monastères, quelques appartements à des veuves qui souhaitaient se retirer à l’abri d’un couvent. L’ordre connut une expansion rapide au cours des deux premiers tiers du XVIIe siècle, principalement en France. À la veille de la Révolution, il comptait 146 couvents dont une quarantaine en Italie, en Allemagne et dans les Pays-Bas autrichiens. Rétabli dès 1805, il essaima en Amérique du Nord et du Sud, au Liban et en Afrique.

Bernard Hours
université de Lyon
laboratoire de recherche historique de Rhônes-Alpes
unité mixte de recherche - CNRS 5190

Source: Commemorations Collection 2010

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