Page d'histoire : Sainte Geneviève Nanterre, été 423 (?) - Paris, 3 janvier 512

Sainte Geneviève ravitaille Paris assiégé par les Huns d’Attila
Toile marouflée de Pierre Puvis de Chavannes - Paris, Panthéon
© Musée d'Orsay, Dist. RMN / Patrice Schmidt

Fille d’un régisseur des terres d’Empire, Severus, et de Gerontia, Geneviève*, dont le prénom est sans doute d’origine latine (Genovefa) ou franque (Kenowifa), n’a rien de l’humble bergère dont on aime à retenir l’image. Elle a passé son enfance et son adolescence à Nanterre et on prétend qu’elle a exercé très jeune des fonctions au conseil de cette ville, ce qui lui donnera une compétence fort utile plus tard dans le domaine de l’administration. Elle est remarquée par deux évêques, saint Germain d’Auxerre et saint Loup de Troyes de passage à Nanterre, pour son dévouement aux pauvres et pour sa piété. Ceux-ci lui prédisent un grand avenir, tant ils ont repéré en elle une sainte future. Elle rejoint alors sa marraine à Paris. Puis elle est vouée à Dieu, en portant le voile blanc des vierges. À Paris, elle est vite connue, aimée et célèbre pour sa générosité et pour son amour du prochain. Elle est riche et ne le cache pas, mais elle fait le don de sa fortune aux plus humbles et soulage les miséreux, ce qui entraîne fatalement des jalousies et une impopularité provisoire. Elle manque même un jour d’être lynchée, mais comme elle ignore la peur, trouvant la force de faire front, grâce à sa foi, elle réussit à calmer les esprits et elle se concilie désormais la sympathie unanime de la population.

Cependant, elle ne se contente pas de mener une vie édifiante et ascétique. Elle va donner toute la mesure de son sens de l’organisation et de son courage, devenant en quelque sorte un véritable maire de Paris. À l’approche des Huns d’Attila en 451, elle rassure les habitants de la cité, leur demande de prier, et veille à leur subsistance. Les Huns certes contourneront Paris dont ils n’avaient aucun intérêt stratégique à s’emparer, ce que sainte Geneviève a parfaitement compris, mais le peuple lui attribuera le miracle d’avoir, par sa seule présence, écarté l’ennemi barbare.

Dès lors, sa popularité va grandissante, surtout lorsque le roi mérovingien Chilpéric fait le siège de Paris en 465 et que sainte Geneviève parvient par ruse, grâce à des bateaux sur la Seine, à gagner Troyes (où elle possède des terres à blé), d’où elle revient sans se faire remarquer afin de nourrir de pain les habitants de la ville.

Une fois le danger écarté, elle va devenir l’administratrice de la cité de Paris, dès lors que les corps constitués civils ont disparu au moment des grandes invasions germaniques. Ce sont les évêques ou les âmes pieuses et charitables, comme elle, qui prennent la relève pour gérer les cités et pour veiller au bon fonctionnement de leurs divers services. Toute sa fortune y passe, mais elle n’a que faire de l’argent qu’elle méprise, vivant modestement et saintement, souvent comme une recluse.

Enfin, avec Remi, évêque de Reims, elle sera l’un des artisans actifs de la conversion de Clovis et de son fameux baptême en 496. Elle demande au roi des Francs de construire une basilique consacrée à saint Paul et à saint Pierre sur la montagne qui porte aujourd’hui son nom. Clovis y sera enterré en 511. Sainte Geneviève le rejoindra l’année suivante, à l’âge de 90 ans, déjà une légende de son vivant et désormais invoquée chaque fois que Paris et la France seront en danger. Clotilde, épouse de Clovis, sera enterrée à ses côtés en 545. La châsse qui se trouve en l’église Saint-Étienne-du-Mont est assez récente et ne contient pas les restes de la sainte, qui furent dispersés au moment de la révolution française.

Joël Schmidt
historien et romancier

* Cf. Célébrations nationales 2002

Source: Commemorations Collection 2012

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