Page d'histoire : Diffusion du premier épisode des Shadoks 29 avril 1968

Illustration, Shadoks SH0026C, dessin par ordinateur de Jacques Rouxel, 2000

Shadoks SH0026C, dessin par ordinateur de Jacques Rouxel, janvier 2000, Paris, collection particulière.

Et si les Shadoks avaient déclenché les événements de mai 68 ? Au milieu des années 1960, Jacques Rouxel (1931-2004) se présente à l’ORTF au mythique service de la recherche dirigé par Pierre Schaeffer. Jacques a le désir d’adapter les comic strips pour la télévision, nouveau média encore balbutiant. Jacques qui a vécu aux États-Unis est influencé par l’illustrateur Saul Steinberg et par les dessins animés du studio U.P.A., eux-mêmes influencés par les artistes modernes comme Miró, Klee… Jacques apprécie également l’humour absurde, ses références : Thurber, Swift, Allais

Mais retournons au service de la recherche qui développe une machine révolutionnaire à faire du dessin animé, l’Animographe, inventé par Jean Dejoux. Ce prototype permet de faire des dessins animés dans un temps record et à un faible coût de production.

Le style de dessin de Jacques Rouxel est idéal pour cette machine, les premiers épisodes des Shadoks sont réalisés. Pourtant, aucun des différents directeurs de l’ORTF qui se succèdent ne veut de cet OVNI télévisuel.

Les principaux protagonistes de ce feuilleton sont les Shadoks, espèces de volatiles stupides dotés de trop petites ailes pour voler, et les Gibis, sortes de saucisses sur pattes affublées d’un chapeau melon et très intelligents ; les deux espèces habitent sur des planètes qui ne marchent pas bien et décident d’aller sur la Terre qui avait l’air de mieux fonctionner : voici pour le résumé de la première série.

Coup de théâtre. Un nouveau directeur, Émile Biasini, est nommé fin 1967. Emballé par les premiers épisodes, il commande toute une série, soit cinquante-deux épisodes. Le premier est diffusé le 29 avril 1968 sur la première chaîne juste après le journal télévisé. Scandale immédiat, c’est la nouvelle bataille d’Hernani, l’ORTF croule sous les lettres de protestations. Peu de temps après, c’est la grève générale, la télé cesse d’émettre, le nouveau directeur est remercié. On demandera même aux spectateurs de donner leur avis au moyen d’un grand référendum pour ou contre les Shadoks. La légende veut que ce soit l’épouse du général de Gaulle qui ait demandé le retour des Shadoks car ses petits-enfants adoraient l’émission.

S’ensuivront trois autres séries, dont la dernière diffusée sur Canal + en 2000 remporte le prix de la meilleure série au Festival international du film d’animation d’Annecy.

Thierry Dejean, auteur-réalisateur
membre de la Cinémathèque française

Source: Commemorations Collection 2018

Liens